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12 novembre 2008 3 12 /11 /novembre /2008 16:04
Ce 11 novembre 2008, le Premier ministre a pris part aux cérémonies commémorant, dans la clairière de Rethondes, le 90e anniversaire de l'Armistice.





Accueilli à l'orée de l'allée triomphale par deux haies d'enfants, porteurs de torches, François FILLON a salué les représentants des nombreuses unités militaires réunies.







Au cours de la cérémonie, baignée d'une lumière grise, deux enfants des écoles de Compiègne ont lu un texte à la mémoire des soldats de toutes les guerres. Le sénateur-maire de la ville, M. Philippe MARINI, et le professeur Jean-Jacques BECKER, historien de la Grande Guerre, président du centre de recherche de l'Historial de Péronne, ont rappelé dans leurs discours la valeur de l'événement.

    Après avoir ranimé la flamme qui brûle devant la dalle centrale, et déposé sur elle une gerbe au nom de la France, le chef du Gouvernement a prononcé le discours suivant.


***

Mesdames et messieurs,

Le onze novembre 1918, la guerre déroulait encore sur cinq cents kilomètres de front ses tranchées de souffrances.
C’était une guerre comme l’homme n’en avait jamais connu, si terrible qu’elle semblait épuiser le monde, et qu’on doutait de pouvoir un jour en guérir les blessures.
Aux campagnes les plus riches de France et de Belgique, elle avait substitué un désert de boue, hérissé de moignons d’arbres ; à des peuples heureux, des cohortes d’hommes harassés, transis d’angoisse.
Sur beaucoup d’entre eux, elle avait laissé sa marque – bras et jambes arrachés, visages détruits, regards absents.
A beaucoup d’autres, encore, elle avait pris la vie.

L’imagination, mesdames et messieurs, nous dresse de la guerre de 1914 un tableau effrayant.
Elle reste tragiquement en dessous de la réalité.
A quelque source qu’on puise - photographies, croquis, témoignages - la vérité de la guerre se révèle plus dure, plus cruelle, plus longue aussi que nos esprits ne parviennent à l’admettre.
Le 11 novembre 1918, l’épuisement secondant les armes, cette guerre prenait fin.

Notre pays en sortait vainqueur, mais l’immense élan de gloire et d’allégresse ne pouvait couvrir le témoignage des survivants et la plaie sanglante de l’hécatombe.


L’armistice était promis. Il fallait fixer un lieu pour le conclure.

Le maréchal Foch le voulait symbolique. Il le voulait distant de la confusion des combats.
Au gré des opérations, il avait conduit aux abords de Compiègne le wagon qui abritait son propre Quartier Général.
Pour évoquer le choix de cet emplacement, en forêt de Rethondes, le général Weygand trouva des mots justes :
« La solitude du lieu, écrivit-il, assurera le calme, le silence, l’isolement, le respect de l’adversaire ».
Calme, silence, respect de l’adversaire : tels sont les sentiments que le lieu continue d’inspirer, et que nous venons y ressentir à notre tour, au fil de notre propre histoire.

Depuis 1918, le 11 novembre symbolise la fin de la Première guerre mondiale.
Ce jour là, l’agitation de notre époque s’estompe, le tracas de l’actualité s’interrompt pour laisser place au recueillement, à la communion nationale.
Dans chaque commune de France, devant chaque monument, devant tous ses noms qui s’alignent sous nos yeux, la même émotion s’installe. La même gravité.
Deux circonstances lui rendent, cette année, une force particulière.

Le 11 novembre 2008, nous célébrons le 90e anniversaire de l’Armistice.
3 générations nous séparent à présent de ce passé dont nous faisons mémoire.
Leur ayant survécu l’une après l’autre, Lazare Ponticelli, le dernier poilu français, mourrait il y a huit mois.




Mesdames et messieurs,

Ces circonstances nous interrogent.
Quel sens conservent nos cérémonies, après 60 ans de paix européenne ?
Devons-nous perpétuer plus longtemps le souvenir d’un passé désormais sans témoins ?
Le 11 novembre doit-il mourir, avec la mort de ses derniers acteurs ?
A ceux qui doutent aujourd’hui de la valeur de cette cérémonie, et de la portée du geste national qu’elle constitue, je suis venu apporter la réponse de la République.
Cette réponse s’adresse à tous, jeunes et vieux, civils et militaires.
Et elle est catégorique.
Le temps n’efface pas notre dette à l’égard de ceux qui donnèrent leur jeunesse pour notre liberté. Il n’efface pas le sens du sacrifice – et il fut immense, chez ces hommes qui offraient leurs vies pour la France, quand leurs familles offraient, à l’arrière, leur attente et leur peur.
Le temps n’efface pas le sens de l’héroïsme – et jamais sans doute, dans l’histoire de la France, il n’y eut tant de héros que dans les tranchées de 1914 !
Héros, ceux qui chargeaient à la baïonnette, sous les balles.
Héros, ceux qui creusaient, se terraient et tenaient sous le fracas des obus.
Héros, ceux qui feignaient la confiance, pour ne pas gagner les autres à leur désespoir.
Héros ceux qui se battirent, non parce qu’ils voulaient la guerre mais parce qu’ils aimaient la paix.
Non, le temps n’efface pas leur courage !
Le temps n’efface pas la solidarité nationale, qui pressait un pays entier derrière ses troupes, et qui, avec elles, se refusait à l’envahissement.
Le temps n’efface pas la fraternité humaine ; et j’insiste sur ce sentiment si puissant qui est peut-être la raison la plus forte de notre présence ici.
Je crois que dans la fièvre de la mobilisation, beaucoup de Français sont partis en guerre avec, au cœur, la haine de l’adversaire.
Ils en sont rentrés avec le respect des Allemands.
Là où ils croyaient combattre un peuple impitoyable, ils avaient rencontré des hommes; ils avaient partagé leurs blessures; ils avaient côtoyé leurs fatigues.



A la même époque, nos soldats venus de métropole et d’outre-mer nouaient dans le sang, avec leurs alliés belges, italiens, portugais, russes, anglais, canadiens, australiens, américains – et tant d’autres encore – la plus mémorable des alliances.


On n’efface pas, même en 90 ans, même en un siècle, les effets d’une pareille épreuve.
On n’efface pas, même en 90 ans, le sentiment profond de commune appartenance qui lie les peuples entre eux, quand ils ont touché du doigt le danger mortel de leur propre acharnement.

Je parle ici en tant que Premier ministre, pour rappeler, sans passéisme, sans nostalgie guerrière aucune, la force de cette conscience historique.
Profondément positive, cette conscience nous invite à nos responsabilités et nous incite chaque jour à construire pour le meilleur de l’humanité.

Si depuis cinquante ans, nous bâtissons l’Europe, ce n’est pas parce que nous avons oublié la guerre, mais parce que son souvenir bien vivant nous interdit de la laisser renaître.
Si la mort du dernier poilu nous adresse une injonction claire, ce n’est pas de tourner la page de la guerre contre l’Allemagne – cette page est tournée, en politique et dans nos cœurs, depuis plus de soixante ans.
Ce n’est pas non plus d’abandonner une commémoration dans laquelle les derniers combattants eux-mêmes, tant qu’ils vécurent, voyaient une marque indispensable de respect pour leurs frères.
C’est au contraire de préserver notre mémoire collective, au-delà des individus et des générations ; de lui trouver de nouveaux relais ; de l’inscrire dans les rites et dans les rythmes d’une société différente ; de chercher pour elle les expressions nouvelles qui la tiendront vivante.

La mémoire de la Première Guerre mondiale doit être une mémoire agissante.
Elle doit nous guider, dans les choix politiques qui sont les nôtres.
Elle doit prévenir les tentations qui hantent notre époque – l’extrémisme national, les propagandes morbides de la défiance et de la haine.
C’est la condition même de notre liberté.

C’est dans la pleine reconnaissance des lumières et des ombres du passé que notre nation s’instruit et se grandit.
Les peuples courageux, les peuples lucides, les peuples libres connaissent leur histoire !
Ils savent l’étudier et l’approfondir; ils savent l’honorer et la partager; ils savent la juger et la condamner, parfois; l’occulter, jamais !

Parce que la guerre de 1914-1918 fut une épreuve atroce, certains voudraient que le temps nous en libère; mais les Français sont-ils prisonniers de leur mémoire ?
Non, ils ne le sont pas, et je veux, bien au contraire, qu’ils en soient les gardiens.
Je veux, en particulier, que dans les écoles de France, l’enseignement de la Première Guerre ne sépare jamais son horreur d’une part de fierté et de reconnaissance.
Cette fierté, nous la devons à nos aïeux, qui, dans le feu de la guerre, pensaient à ceux qui les suivraient.


Nous la devons aussi notamment à nos soldats; eux, qui, aujourd’hui encore, à travers le monde, engagent leurs vies dans les combats du droit et de la sécurité internationale.

Je rends à leur esprit de dévouement, à leur patriotisme et à leur professionnalisme un hommage profond.
Ils perpétuent les traits valeureux d’une nation libre et souveraine.

Trois générations après l’armistice, ma présence, à Rethondes, au nom de la France, prouve la force de notre fidélité.
Cette commémoration renouvelle notre mission de transmettre: notre devoir de ne jamais éteindre la flamme du souvenir.

Sous les litanies douloureuses de noms égrenés devant nos monuments, je souhaite que chacun puisse entendre les cris et les voix entrelacées de la France unie, de l’Europe fraternelle, et de la paix.


 

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commentaires

T
Merci Monsieur le Premier Ministre. Pour ce discours réaliste: 285 Toussaint tués durant cette guerre dont les cinq frères de mon grand'père. Ce colosse silencieux qui un jour de 1940 pleurait en silence. J'avais 3 ans et lui demande pourquoi ces larmes "nous voici encore en guerre contre les allemands". Il est vrai qu'il avait été fait prisonnier et hébergé dans une ferme allemande dont le fils unique était au front. Il fut traité comme le fils de la famille durant toute cette guerre 14-18...
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J
Emouvantes cérémonies. A l'écoute de notre hymne national, "la Marseillaise", je ne suis pas hostile à un autre hymne lors des rencontres sportives. Je pense qu'un hymne propre au  Sport pourrait être envisagé, voire un hymne européen mais dédié aux rencontres sportives internationales. Les paroles de notre hymne ne sont pas, pour moi, compatibles avec les évènements sportifs (exemple : athléte convaincu de dopage à postériori mais qui à bénéficié de notre hymne). Continuez. Bon courage.Cordialement.   
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