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1 février 2011 2 01 /02 /février /2011 14:37

 

  François Fillon assiste à la Soudure du dernier rail de la ligne à grande vitesse Rhin-Rhône qui va être mise en service dès la fin de cette année, le 31 janvier 2011.
 

Madame et Messieurs les ministres,

Mesdames et Messieurs les Parlementaires,

Mesdames et Messieurs,

 

Souder le dernier rail de la ligne à grande vitesse qui va être mise en service dès la fin de cette année c’est un geste exceptionnel et c’est un geste qui nous a tous réjouis.

Au sein deRéseau Ferré de Franceet de la SNCF, comme des entreprises de travaux publics et d’équipements ferroviaires, je pense que nous avons tous été frappés par l’enthousiasme de tous ceux qui ont contribué à réaliser ce projet.

Notre pays aime se mobiliser autour de grands défis industriels et technologiques. Il aime se projeter vers l’avenir.

Il y a toujours en nous cette part de rêve et de fierté qui est à la source du progrès.

 

Pour la première fois, une ligne à grande vitesse va relier plusieurs régions françaises, sans viser d’abord à une connexion directe à Paris.

Pour les habitants d’Alsace, de Franche Comté, de Bourgogne, de la région Rhône-Alpes, cette ligne transversale constitue une avancée formidable, qui va considérablement les rapprocher.

 

C’est un progrès pour tous les usagers : Strasbourg ne sera plus qu’à 2h00 de Dijon, Besançon à 2h05 de Paris et 45mn de Mulhouse, et la nouvelle gare de Belfort-Montbéliard à 2h15 de Paris.

Cette ligne a, comme cela vient d’être souligné, une très forte vocation européenne. La participation de l’Union européenne et de la Suisse au financement de ce projet le démontre.

Elle va permettre à plusieurs grandes régions françaises d’être mieux reliées à l’Allemagne et la Suisse.

 

La mise en place de réseaux efficaces de transport transeuropéen est un enjeu essentiel.

Elle fait d’ailleurs actuellement l’objet de discussions à Bruxelles, afin de définir les priorités du réseau transeuropéen de transport après 2013.

Et je peux vous dire que la France est totalement mobilisée sur ce sujet.

 

A bien des égards, cette nouvelle ligne est exemplaire.

Elle l’est d’abord en termes d’insertion environnementale.

Le Grenelle de l’environnement a beaucoup contribué à faire évoluer notre approche des grands projets, et la démarche participative adoptée ici sur cette ligne est emblématique de la politique que nous voulons mener par ailleurs, sur tous les grands investissements de transport que nous réalisons dans notre pays.

Associer l’ensemble des acteurs de terrain à la définition des projets à forte valeur environnementale, au-delà même des obligations réglementaires, c’est la meilleure façon d’éviter ce qu’on pourrait appeler une vision punitive de l’écologie.

 

Au plan social également, ce projet est exemplaire.

C’est le premier projet de cette nature pour lequel une clause d’insertion figure dans les appels d’offres.

Nous avons pu tout à l’heure rencontrer plusieurs des personnes qui ont bénéficié de ces dispositions, et je suis confiant dans le fait que cette insertion leur permettra, au-delà de ce chantier, de retrouver leur place dans le marché du travail.

Je veux saluer l’engagement de Réseau Ferré de Francesur ce point et la mobilisation de toutes les entreprises qui ont su répondre présent. Je pense que nous allons pouvoir nous inspirer de cette expérience pour la généraliser à beaucoup d’autres grands projets et à beaucoup d’autres appels d’offres que nous sommes en train de préparer.

 

Mesdames et Messieurs,

 

Le développement des lignes à grande vitesse a été et demeure un formidable moyen de développement et d’aménagement du territoire.

Cette vitrine technologique unique pour la France est née de la volonté des pouvoirs publics et elle a pu s’appuyer sur un engagement sans faille de nos entreprises. Cette année, nous fêterons le 30° anniversaire de la mise en service du premier TGV.

 

En lançant le programme TGV, le Général de GAULLE et le Président POMPIDOU nous ont légué un atout majeur dans la compétition internationale.

Et je me souviens des premiers essais auxquels j’avais eu la joie de participer en Alsace, alors que Joël LE THEULE était ministre des Transports du Président GISCARD d’ESTAING, quand on essayait les premières rames de TGV au-delà de 300 kilomètres.

 

A notre tour, avec les investissements d’avenir, nous construisons nos positions dans l’économie de demain, comme l’ont fait nos prédécesseurs.

Cette année, entre 15 et 20 milliards d’euros seront engagés.

Au cours du mois de janvier, une cinquantaine de laboratoires français ont été sélectionnés pour recevoir 340 millions d’euros. Ils vont pouvoir acquérir les équipements scientifiques de pointe qui les aideront à faire la course en tête dans la compétition mondiale.

L’industrie bénéficiera elle aussi des investissements d’avenir, en particulier les matériels de transport, qui est un domaine dans lequel la France a une longue et très forte tradition d’excellence.

2 milliards et demi d’euros seront consacrés au total au développement des avions, des automobiles, des trains et des navires du futur.

 

Préparer l’avenir, c’est aussi saisir les opportunités ouvertes par le Grenelle de l’environnement.

Le développement durable nous offre de nouvelles perspectives dans tous les domaines : celui de l’énergie, les bâtiments, le véhicule électrique.

Là encore, c’est une écologie créatrice de richesses au service de la croissance, de l’emploi, du développement des territoires que nous devons mettre en œuvre.

 

Dans le domaine ferroviaire, le Grenelle de l’environnement a été à l’origine d’un effort sans précédent dans la création de nouvelles lignes à grande vitesse.

 

La LGV Rhin Rhône, vous le savez bien, ne se limite pas à la première phase de la branche Est.

Dans le cadre du plan de relance, un effort singulier a été fait pour financer les études et les acquisitions foncières de la deuxième phase, conformément aux engagements qui avaient été pris par le Président de la République à Ornans le 17 mars 2009.

Une mission sur le financement des travaux a été confiée à Claude LIEBERMANN, avec l’appui de Marie-Anne BACOT.

Je suis sûr que, comme il l’a fait avec succès sur d’autres lignes, et comme il continue de le faire pour le contournement de Nîmes et de Montpellier, il saura réunir efficacement les partenaires pour permettre la réalisation de ce projet.

 

Je sais combien vous tenez au développement des branches Ouest et Sud.

Elles sont dans des phases moins avancées et certains ont crû pouvoir en tirer un argument pour dire qu’elles ne se feraient pas.

Ces deux lignes sont inscrites dans la loi Grenelle I et je vous le dis clairement : nous restons déterminés à faire avancer ces projets.

Dès cette année, d’importantes étapes seront franchies.

Pour la branche Ouest, je souhaite que la commission nationale du débat public soit saisie avant la fin de l’année. Un financement de 36M€ est prévu au CPER pour les études de cette branche Ouest et de la branche Sud.

 

Pour cette branche Sud, qui donnera au projet toute sa dimension européenne, le bilan, tiré en 2010, de la concertation qui a été conduite fin 2009 a conduit à demander des études complémentaires sur quelques points.

Ces dernières études complémentaires devront être finalisées avant l’été, pour déterminer la feuille de route en concertation étroite avec les élus des territoires traversés.

 

Outre la ligne Rhin-Rhône, aujourd’hui, la LGV Est est entrée dans sa deuxième phase de construction : dans cinq ans, elle mettra Paris à 1h50 de Strasbourg.

 

Je veux saluer l’implication considérable des collectivités qui, depuis le début, ont porté ce projet, aux côtés de l’Etat et avec le soutien de l’Union européenne.

Philippe RICHERT le sait bien, l’engagement des collectivités est décisif dans la réalisation de ces infrastructures. Et seule la concrétisation effective de ces engagements permet le lancement de ces lignes.

 

En ce moment, les collectivités des Régions Aquitaine, Midi-Pyrénées, Centre, Limousin et Poitou-Charentes délibèrent pour le financement de la ligne Tours - Bordeaux.

Elles doivent le faire le plus rapidement possible pour que le projet soit lancé, comme par ailleurs tout le monde le souhaite, dans les meilleurs délais.

Dans l’état actuel des finances publiques, il est impératif que tous s’engagent pour mettre en œuvre des projets de cette envergure. Je veux dire que l’Etat ne palliera pas les défauts de financement, tout simplement parce qu’il ne le peut pas.

 

Le conseil d’administration de Réseau Ferré de France vient de désigner l’attributaire pressenti pour réaliser la ligne Bretagne-Pays de la Loire, et je m’en voudrais de ne pas la citer.

Je suis convaincu qu’elle sera un atout majeur pour la Bretagne et pour le Grand Ouest.

Si l’on ajoute, à la ligne Bretagne - Pays de la Loire, la ligne Tours-Bordeaux, la deuxième phase de la LGV Est et le contournement de Nîmes-Montpellier, cela va nous faire quatre lignes en construction dans les années à venir, ce qui ne s’est jamais produit dans l’histoire de notre pays, en tout cas s’agissant de la grande vitesse, pour une mise en service entre 2016 et 2017.

 

C’est un effort sans précédent, qui dit bien l’importance que le Gouvernement attache au domaine ferroviaire.

 

Certains ont crû bon de critiquer la démarche et les résultats du Grenelle de l’environnement. Eh bien je les renvoie aux exemples que je viens de citer, qui prouvent que le Grenelle de l’environnement contribue de façon tout à fait quotidienne à améliorer les déplacements de nos concitoyens.

 

Le Grenelle prévoit bien d’autres projets que nous aurons à réaliser.

Mais avant, il faudra conduire des études sérieuses et trouver des financements.

Il n’est pas question de se lancer dans une politique inconsidérée de dépenses que nos finances ne nous permettent pas d’assumer.

Nous devrons hiérarchiser les projets. Et nous devrons impérativement évaluer chacun d’entre eux avant de l’engager.

 

Le Grenelle de l’environnement nous a laissé un acquis majeur, qui doit servir, monsieur le président, de boussole à Réseau Ferré de France.

Je veux parler de l’impératif d’entretien et de renouvellement du réseau existant.

Cet acquis est peut-être moins spectaculaire que ce que nous venons de faire à l’instant, mais au fond, je veux le dire solennellement c’est le plus fondamental.

Qui serions-nous en effet si nous laissions aux générations futures quelques milliers de kilomètres de ligne à grande vitesse, et, à côté, 30 000 km de voies non entretenues à reconstruire ?

 

Pour réussir ce renouvellement, tous les acteurs du système ferroviaire doivent faire des efforts de productivité.

Chaque année, plus de dix milliards d’euros sont injectés dans le système ferroviaire par l’Etat et les collectivités locales.

Cela crée des obligations pour tout le monde.

 

Bien sûr, l’engagement de qualité ne se limite pas à la question de la gestion des infrastructures.

Nos concitoyens attendent légitimement d’avoir un service qui soit à la hauteur des efforts de la collectivité nationale.

Les dernières semaines ont été difficiles.

Et en dépit de la mobilisation des cheminots, beaucoup de nos concitoyens ont été confrontés à des situations qui n’étaient pas acceptables.

Des mesures ont été prises et des programmes d’amélioration vont être mis en œuvre.

Avec Nathalie KOSCIUSKO-MORIZET et Thierry MARIANI, je veux vous dire que le Gouvernement y sera très attentif.

 

L’action de tous doit d’abord être guidée par l’attente des usagers.

Leur quotidien ne doit pas être négligé ! Il ne doit pas être considéré comme un problème parmi d’autres, mais comme un devoir de service public. La régularité, la sécurité, l’information doivent être assurées.

Que ce soit pour les TGV, pour les TER, pour les trains d’équilibre du territoire ou pour le Transilien, je demande à la SNCF et à RFF de mobiliser, de concert, leurs efforts pour y répondre.

La première de ces attentes, c’est souvent d’ailleurs d’être simplement informés et écoutés.

Je sais que le Président PEPY a entendu ce message et que la SNCF a placé ses clients au cœur de ses priorités.

 

Depuis 2007, le Gouvernement a engagé de profondes réformes dans le secteur des transports.

Dans le seul secteur ferroviaire, il y a eu deux avancées importantes au cours des derniers mois.

Premièrement, l’autorité de régulation des activités ferroviaires a été mise en place. Sous la présidence de Pierre CARDO, elle va favoriser l’émergence d’une concurrence, qui doit être une concurrence saine et une concurrence régulée et offrir à tous les acteurs une meilleure visibilité.

 

Ensuite, la convention sur les trains d’équilibre du territoire a été signée entre l’Etat et la SNCF, conformément à la demande du Président de la République.

C’est une étape essentielle.

En garantissant un financement durable basé sur la contribution des sociétés d’autoroute et du TGV, elle va permettre de pérenniser les lignes.

Elle va aussi améliorer la qualité de service, en modernisant notamment le matériel roulant à hauteur de 300 millions d’euros.

Des indicateurs de qualité de service public conditionneront le niveau des subventions.

 

D’autres réformes sont en cours, parfois difficiles, je pense à celle du fret ferroviaire.

Mais je veux vous dire que le Gouvernement les poursuivra, parce que ce sont des réformes qui sont absolument indispensables pour affronter l’avenir.

Sur les TER, la mission que conduit Francis GRIGNON pour préparer leurs évolutions avec sérénité et détermination doit aboutir en 2011.

 

Au-delà du secteur ferroviaire, la question des transports en commun nous mobilise pleinement.

En Ile de France, la semaine dernière, Maurice LEROY et Nathalie KOSCIUSKO-MORIZET ont conclu un accord essentiel avec la Région pour mettre en œuvre le projet du Grand Paris et moderniser le réseau existant.

Dans les autres régions, le résultat du deuxième appel à projets sur les transports en commun en site propre sera très bientôt connu.

 

Le domaine routier reste un enjeu économique majeur pour notre pays. Là aussi, nous préparons l’avenir.

Pour maintenir la compétitivité de nos entreprises tout en mettant en place l’éco taxe qui a été décidée dans le cadre du Grenelle de l’environnement, nous allons porter la capacité de transport à 44 tonnes, comme c’est déjà le cas pour les secteurs agricoles et agro-alimentaires depuis le 18 janvier.

 

Parallèlement, dans les mois qui viennent, nous allons finaliser la réforme des ports.

Dans un contexte toujours plus concurrentiel, cette réforme est indispensable, indispensable pour assurer leur compétitivité et, au-delà, indispensable pour assurer la compétitivité de tout le secteur logistique.

Je veux dire à ce sujet que je regrette vivement les mouvements sociaux en cours, qui détournent armateurs et clients vers Anvers ou vers Barcelone.

 

Thierry MARIANI a déjà eu l’occasion de le dire : le Gouvernement n’est pas opposé à un accord de branche entre les organisations syndicales et les organisations patronales; il veut simplement que cet accord se place dans le cadre de la loi, ce qui me semble assez évident, et qu’il ne repose pas sur des financements publics.

C’est une question d’équité vis-à-vis des autres secteurs.

Sur ces bases, je ne doute pas que les partenaires retrouveront rapidement le chemin de la négociation.

 

Voilà, Mesdames et Messieurs.

 

L’ouvrage que nous venons de visiter aujourd’hui, qui m’a permis d’acquérir une nouvelle compétence, celle de la soudure de rails, enfin si on peut vraiment dire que j’ai soudé un rail, est le fruit d’un savoir-faire dont je voudrais que chacun mesure que le monde entier nous l’envie.

C’est le fruit de notre engagement collectif auprès des Français de tous les territoires.

C’est le fruit de notre détermination à rester à la pointe d’une technologie qui a vu naître des aventures industrielles extraordinaires.

Nous avons toutes les raisons d’être fiers de notre industrie ferroviaire. Nous avons toutes les raisons d’être fiers d’avoir été les premiers à avoir cru dans la grande vitesse, et nous devons tout faire aujourd’hui pour faire en sorte que cette industrie ferroviaire continue de se développer, qu’elle apporte naturellement à nos concitoyens le service amélioré qu’ils en attendent, mais qu’elle soit aussi l’occasion de créer de la richesse et de l’emploi, et de faire briller la technologie française dans le monde entier.

 

Mais cette réussite nous met aussi devant nos responsabilités, en rappelant que des efforts sont indispensables pour rester compétitifs. Nous étions les premiers, voire presque les seuls dans ce domaine de la grande vitesse. Ce n’est plus le cas aujourd’hui et il faut continuer à nous battre pour rester au premier rang, et je pense que chacun ici a conscience de l’effort que nous devons conduire. Et pour ma part, je veux dire que l’Etat sait pouvoir compter sur l’engagement de chacun d’entre vous.

 

Je vous remercie.

 

 

 

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28 janvier 2011 5 28 /01 /janvier /2011 12:30

 

 

   François Fillon visite le siège de Microsoft et rencontre des créateurs de "start up" le jeudi 27 janvier 2011.(1ère partie)
François Fillon échange avec des journalistes et des jeunes créateurs de "start up" au siège de microsoft à Issy les Moulineaux le 27 janvier 2011.(2ème partie)

Je voulais depuis longtemps venir ici à Microsoft, parce que l’entreprise symbolise beaucoup des priorités de la politique économique du Gouvernement, à la fois parce qu’elle représente la très haute technologie, l’avenir de l’économie mondiale et qu’elle a fait un choix d’implanter une grande partie de ses activités, notamment de ses activités de recherche en France et je sais qu’un certain nombre de mesures que nous avons prises, comme le crédit impôt recherche n’y est pas étranger. Et puis ensuite, et c’est la raison pour laquelle je suis avec Xavier BERTRAND et Nadine MORANO ici ce matin, parce que Microsoft est une entreprise exemplaire en matière d’alternance, en matière d’apprentissage,5 % de ses recrutements sont en alternance c’est plus que le niveau légal minimum. ET il se trouve que cela correspond à une priorité absolue du Gouvernement.

 

Nous avons, hier, enregistré des chiffres du chômage pour le mois de décembre qui sont mauvais, qui sont d’ailleurs mauvais dans la plupart des pays de la zone euro et qui montrent que la crise économique a encore des effets profonds sur les économies européennes. En même temps, il faut replacer ces chiffres du chômage dans une perspective. En 2009, nous avons détruit, la crise a détruit un peu plus de 330.000 emplois, a provoqué une augmentation du chômage de 440.000 personnes. En 2010, nous avons créé 74.000 emplois, l’économie française a créé 74.000 emplois, faisant redescendre l’augmentation du chômage autour de 80.000. Et on voit, et tous les chefs d’entreprise le confirment, qu’on est dans une phase de reprise de l’économie européenne, qu’on est dans une phase de reprise de l’économie française, et que l’année 2011 va être une année qui doit permettre de faire reculer le chômage. Et pour le faire reculer, il faut continuer à prendre des mesures, et la plus importante pour nous, c’est la mesure qui consiste à traiter la question du chômage des jeunes qui reste trop importante dans notre pays. C’est pour cela que l’exemple de Microsoft est pour nous un exemple extrêmement intéressant et qu’on veut au fond populariser, utiliser pour entraîner les autres entreprises parce que l’apprentissage est une des solutions les plus efficaces pour lutter contre le chômage des jeunes. Nous nous sommes fixé un objectif de 600.000 jeunes en alternance. Pour y arriver, on a besoin d’abord que les partenaires sociaux nous fassent un certain nombre de propositions sur la manière de mettre en place cette relance de l’alternance. Ils ont été saisis, ils sont en train de travailler, nous attendons avec impatience leurs propositions et Xavier BERTRAND et Nadine MORANO auront la charge de les mettre très vite en place. Ensuite, nous avons un chômage de longue durée, qui est encore beaucoup trop important. C’est la raison pour laquelle, malgré une situation financière qui est très difficile, malgré la nécessité absolue de respecter les engagements que nous avons pris en matière de réduction des déficits, ne serait-ce que pour assurer la solidité de la monnaie européenne, nous allons maintenir à un haut niveau, les contrats aidés parce que les contrats aidés constituent une réponse, une réponse passagère mais une réponse nécessaire à la question du chômage de longue durée.

 

Et puis enfin il y a la question des seniors qui ont été particulièrement frappés par la crise. Nous avons mis en place des mesures qui, je le reconnais sont des mesures contraignantes pour les entreprises, maintenant il faut qu'elles soient appliquées. Et nous allons être extrêmement sévères dans leur application. Pourquoi ? Parce que c'est l'intérêt des entreprises de garder les seniors, c'est l'intérêt des entreprises de ne pas se débarrasser de compétences, qui sont des compétences très importantes. Et puis, nous venons de voter une réforme des retraites qui était nécessaire, une réforme des retraites qui est d'ailleurs à l'identique ou à l'image de tout ce qui se fait dans tous les pays européens. Je constate d'ailleurs qu'aujourd'hui même le Gouvernement espagnol a réussi un accord avec les partenaires sociaux sur le passage de l'âge de la retraite à 67 ans. Cette réforme elle est nécessaire à la compétitivité de l'économie française, donc c'est très important pour une entreprise comme Microsoft, comme pour toutes les entreprises françaises, de pouvoir avoir un coût du travail, un niveau de charge qui soient dans une moyenne, qui lui permette de mener la compétition au plan international. Mais si on met en place un allongement de la durée du travail, il faut aussi que les entreprises comprennent qu'il faut garder les salariés jusqu'à l'âge de la retraite. Voilà, ça fait beaucoup de raisons de notre venue ici.

 

Je veux terminer simplement en disant que le plus important en matière d'emploi, au-delà des mesures ponctuelles que je viens d'évoquer, qui sont nécessaires dans une phase de crise, c'est de continuer à améliorer la compétitivité de l'économie française. Il n'y a pas d'autre solution, il n'y a pas de remède miracle pour créer des emplois, pour exporter il faut qu'on soit aussi bon que les meilleurs et en particulier qu'on soit aussi bon que les meilleurs en Europe. C'est la raison pour laquelle nous avons supprimé la taxe professionnelle, c'est une mesure qui va s'appliquer pleinement en 2011 et qui va avoir des effets sur la compétitivité des entreprises. C'est la raison pour laquelle nous avons tellement tenu à conserver le crédit impôt recherche au niveau où il était, malgré toutes les tentatives qui étaient nées ici ou là pour le réduire. Et c'est la raison pour laquelle on va continuer à travailler sur l'allégement des contraintes qui pèsent sur les entreprises, sur toutes les procédures pour pouvoir créer vite son entreprise, l'auto entrepreneur, les dispositifs qu'on a imaginés pour faire en sorte que ceux qui créent leurs entreprises ne soient pas obligés de risquer tout leur patrimoine, puissent mettre à l'abri une partie de ce patrimoine. Et puis, naturellement, il faut continuer à faire un très gros effort sur la recherche ou l'innovation, et ce sera le cas avec les 35 milliards d'investissements d'avenir que nous sommes en train de mettre en œuvre. Les appels à projet sont en train de se multiplier et je suis sûr que, peut-être Microsoft, ou peut-être les jeunes entreprises qui viennent à l’instant de se présenter, auront peut-être l’occasion de participer à ces appels à projet. En tout cas c’était vraiment un grand plaisir pour moi de venir aujourd’hui à Microsoft.

 

Peut-être que la presse, qui est toujours curieuse, a des questions à poser.

 

 

Journaliste : Monsieur le Premier ministre, est-ce que vous avez bien conscience qu’une partie de la présidentielle se jouera notamment sur vos résultats en terme d’emploi, en l’occurrence ces chiffres de l’année passée qui ne sont pas pour vous un motif de satisfaction, j’imagine, voire de résignation, d’angoisse ?

 

Ce n’est pas la présidentielle qui se joue sur la question de l’emploi, c’est l’avenir de notre pays, c’est l’avenir de notre jeunesse. Voilà, c’est un sujet qui dépasse de très très loin la compétition politique. Nous avons eu une première phase, notamment en 2007, qui était une phase de diminution forte du chômage, qui était liée à une croissance économique importante. Nous avons eu une crise extrêmement grave qui a provoqué une augmentation du chômage dans le monde entier et en particulier en Europe, on est maintenant sur la reprise. Il y a des caractéristiques de l’économie française qui sont négatives en matière de créations d’emploi, on le sait bien, et notamment tout ce qui bloque l’arrivée des jeunes sur le marché de l’emploi. Donc on va se battre tout au long de l’année 2011, et je fais confiance à Xavier BERTRAND et à Nadine MORANO, à la fois pour être tenaces mais aussi pour avoir de l’imagination. Et je suis convaincu que si on n’a pas d’accident en terme de crise des dettes souveraines européennes - et on fait tout pour ne pas en avoir - l’année 2011 sera une année de reprise économique forte, telle qu’elle peut l’être en Europe, naturellement compte tenu des caractéristiques de l’Europe. Et je suis convaincu qu’en 2011, on va faire reculer le chômage grâce à une croissance économique forte et aux mesures que nous avons prises.

 

Journaliste : Monsieur le Premier ministre, un de vos interlocuteurs sur ce sujet c’est la CGT de Bernard THIBAULT. Ce matin on évoque son départ, comment est ce que vous voyez cela ?

 

Ecoutez, j’aimerais en parler avec Bernard THIBAULT. Bernard THIBAULT est un partenaire du Gouvernement, en tant que responsable d’un grand syndicat. J’ai eu l’occasion de travailler avec lui à plusieurs reprises, comme ministre des Affaires Sociales et comme Premier ministre. Voilà, je ne sais pas quelle est la réalité de cette information mais en tout cas j’ai du respect pour Bernard THIBAULT qui dirige une grande organisation syndicale.

 

Journaliste : Une dernière question. Ce matin, François BAYROU a attaqué assez vivement l’UMP sur le cercle des premiers donateurs, le Premier cercle des donateurs de l’UMP. Au moment où on parle justement de légiférer - vous avez été mandaté par le Président sur les conflits d’intérêts - est ce que vous ne trouvez pas que cet affichage à décomplexer l’UMP vis-à-vis de ces grands donateurs est un peu contradictoire avec votre engagement de légiférer sur le conflit d’intérêts ?

 

Je pense que s’agissant de François BAYROU, pour lequel j’ai par ailleurs aussi beaucoup de respect et d’amitié, c’est juste de la jalousie. C'est-à-dire que quand on fait de la politique, on cherche à utiliser naturellement l’ensemble des moyens légaux pour faire campagne et pour faire passer son message. Il y a des lois dans notre pays, ces lois permettent dans des limites qui sont précises et avec toute la transparence nécessaire d’aider les partis politiques, c’est normal que chaque parti politique cherche à attirer à lui le maximum de soutiens dans le respect de la légalité et de la transparence. Quand aux conflits d’intérêts, je vais avoir l’occasion dans les prochaines semaines de m’entretenir avec les parlementaires sur la préparation du projet de loi sur les conflits d’intérêts, vous savez que c’est une initiative du Gouvernement, c’est une initiative du Président de la République. Le rapport qui a été remis hier contient beaucoup de propositions, on va donc regarder avec les parlementaires quelles sont celles qu’on retient dans un projet de loi. Il y a beaucoup de choses, j’allais dire, qui vont presque de soi, sur les déclarations pour que la transparence soit totale, sur la mise en place d’une structure qui permette quand on est en situation de doute, parce que la caractéristique de ces conflits d’intérêts c’est que souvent ce n’est pas d’une clarté parfaite, c'est-à-dire on s’interroge et il faut avoir une référence, une organisation à laquelle on peut faire référence. Bon, il y a des propositions sur lesquelles j’ai plus de réserves. Il y en a une qui est assez curieuse qui consisterait à interdire à un membre du Gouvernement d’être responsable d’un parti politique. C’est juste le contraire de la démocratie. Je veux rappeler que dans toutes les grandes démocraties modernes qui sont des démocraties parlementaires, les ministres sont d’abord des responsables de partis, en général le Premier ministre est même le président de son parti. C’est donc une proposition qui m’étonne un peu et qui a une sorte de connotation technocratique qui vous fait comprendre que je n’ai pas l’intention de la retenir. Voilà, je vous remercie beaucoup.

 

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26 janvier 2011 3 26 /01 /janvier /2011 17:44

 

 

François Fillon rappelle qu'il n'y a eu aucune exportation de matériel de maintien de l'ordre vers la Tunisie ni au mois de décembre, ni au mois de janvier 2010-2011, lors des questions au gouvernement à l'Assemblée nationale le 26 janvier 2011.

 

Monsieur le Président,

Mesdames et Messieurs les députés,

 

Les accusations que vous portez depuis deux jours sont des accusations sans fondement, qui déshonorent ceux qui les portent, et je vais m’en expliquer.

 

Premièrement, il n’y a eu aucune exportation de matériel de maintien de l’ordre - et nous ne parlons pas d’armes évidemment -, il n’y a eu aucune exportation de matériel de maintien de l’ordre ni au mois de décembre, ni au mois de janvier 2010 et 2011.

 

Deuxièmement, les exportations de matériel de maintien de l’ordre, dans notre pays, ne sont pas soumises à la même procédure d’autorisation que les exportations d’armes, et vous le savez très bien. Ce sont des exportations qui sont contrôlées par les Douanes, ce sont des exportations qui, en l’occurrence, ont fait l’objet normalement d’un contrôle des Douanes, qui ont constaté que le contenu des envois d’entreprises françaises au gouvernement tunisien n’était pas conforme aux documents et aux autorisations qui avaient été donnés et donc ces armes ont été bloquées. Ces matériels de maintien de l’ordre : il s’agissait en l’occurrence de grenades lacrymogènes, il s’agissait d’uniformes de police et il s’agissait de matraques.

 

Maintenant, j'aimerais que le Parti socialiste, avant de poser des questions comme celle-là et d'accuser comme l'ont fait hier les députés socialistes, le Gouvernement d'avoir autorisé des exportations d'armes - j'ai même entendu parler d'armes à feu hier - en Tunisie, fasse preuve d'un peu plus de prudence et regarde ce qui s'est passé dans les années précédentes.

 

Entre 1997 et 2002, ont été livrés au ministère de l'Intérieur tunisien des grenades éblouissantes, des grenades fumigènes, des grenades à main fulgurantes, des pistolets calibre 9 millimètres, des pistolets automatiques, des fusils d'assaut automatiques. Voulez vous que je continue la liste ? Mais je vais en ajouter : à destination de la Présidence de la République des fusils semi automatiques, des fusils à pompe à répétition, des gilets pare-balles et des menottes en plastique. Et bien, nous n'avons pas pratiqué ces exportations à destination de la Tunisie dans la période que vous évoquez. Vous devriez avoir honte de proférer des accusations comme celles-là, elles sont déshonorantes pour vous et elles ne servent pas la France.

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26 janvier 2011 3 26 /01 /janvier /2011 11:47

 

 
 

François Fillon reçoit le prix du Trombinoscope à l'hôtel de Lassay le 25 janvier 2011

 

Mesdames et Messieurs,

Chère Arlette CHABOT,

 

J’imagine les débats vifs qui ont dû nourrir vos conciliabules car la France ne manque pas de personnalités politiques de talent, à tel point qu’il faut, même parfois, inventer des procédures complexes pour tenter de les départager.

 

Je ne sais pas que penser de ce Prix et je veux tout de suite avouer que j’ai hésité à venir le recevoir. Parce que les défis que notre pays doit surmonter se prêtent assez peu aux hommages personnels. Mais je n’ai pas voulu que mon absence puisse passer pour de l’arrogance. Je tiens en haute estime les distinctions qui honorent nos militaires, nos scientifiques, nos écrivains, mais franchement, les Prix qui distinguent les hommes politiques sont sujets à caution.

 

Ils le sont d’abord pour ceux qui n’ont pas été choisis : et à cet égard, mes concurrents ne manqueront pas, à juste titre, de vous accuser d’avoir gravement sous-estimé mes lacunes. Ils le sont aussi et surtout pour les Français qui jugent assez sévèrement la comédie du pouvoir et qui rejettent tout ce qui pourrait donner à croire que la politique est un jeu.

 

Vous me répondrez que ce Prix est sérieux, et il semble en effet l’être puisque vous avez choisi un Premier ministre qui ne présente ni les atouts d’un jeune premier – vous l’avez même qualifié… vous avez dit que je n’étais pas un enfant de chœur – ni les attraits d’un personnage décoiffant.

 

Voilà presque quatre ans que j’ai l’honneur de servir mon pays à Matignon. J’assume ma mission avec autant de loyauté et de sérieux possible, et finalement, j’ai le sentiment que je ne fais rien d’autre que mon devoir.

 

Est-ce que c’est cette longévité que vous avez voulu récompenser ? Si c’est le cas, je veux vous dire que vous avez bien fait. Parce que, au-delà de ma personne, la France a besoin de continuité gouvernementale. Et cette continuité, c’est le Président de la République qui a choisi de l’assumer et c’est donc vers lui que cette récompense est également tournée. Elle est aussi tournée vers les parlementaires de la majorité avec lesquels j’entretiens une relation de confiance, sans laquelle rien ne serait possible.

 

Si ce n’est pas la longévité, est-ce que c’est une certaine façon de faire de la politique que les membres de votre jury ont voulu saluer ? Comme j’ai compris qu’ils étaient tous journalistes, si c’est le cas, c’est un vrai acte de courage puisque comme chacun sait, ma façon de faire de la politique consiste à me tenir le plus possible éloigné des journalistes et de la presse.

 

En tout cas, je vous laisse le soin de répondre ; mais je veux simplement vous dire que, pour moi, la politique a toujours été une affaire grave. Pardon, mais nos décisions touchent des millions de gens, engagent le sort de la France ; c’est une responsabilité difficile et qui ne peut pas être exercée de façon légère. C’est ma conviction.

 

Evidemment, je discerne bien derrière ce Prix le jugement des observateurs avisés du jury, pour qui les coulisses du pouvoir révèlent les tempéraments, les ambitions secrètes, les revers personnels… Je ne suis pas candide, mais contrairement à ce qui est dit ou écrit, je veux vraiment vous assurer que la politique n’obéit pas toujours à des stratégies aussi sophistiquées que celles que vous vous plaisez à imaginer. Il faut juste faire les choses au mieux, avec sincérité, avec lucidité, en essayant simplement d’être utile.

 

Voilà, Mesdames et Messieurs, les réflexions que ce Prix m’inspire. Je suis sensible à votre geste parce que je sais qu’il n’y a, parmi vous, que des experts expérimentés et passionnés de la politique. Je ne sais pas si les Français sont sur la même longueur d’onde, mais ce que je sais, c’est que mon dernier fils, qui a 9 ans, va pouvoir enfin respecter mon travail, lui qui a longtemps cru que mon métier consistait à signer des lettres et à réparer des ordinateurs.

 

Ce Prix renforce mes devoirs à l’égard de notre pays. Et c’est peut-être là le message d’avertissement que vous vouliez me faire passer. Merci.

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19 janvier 2011 3 19 /01 /janvier /2011 10:51

 

François Fillon rappelle que la France souhaite l'organisation d'élections libres en Tunisie lors des questions d'actualité à l'Assemblée nationale le mercredi 19 janvier 2011.
 

Monsieur le Président,

Mesdames et Messieurs les députés,

Monsieur le Président Ayrault,

 

 

Je voudrais d'abord dire toute ma confiance à madame Alliot-Marie et regretter l'exploitation peu honnête que vous faites de ses propos.

 

L'histoire, mesdames et messieurs les députés, avance souvent plus vite que la diplomatie, et nous avons fait collectivement l'expérience de cela lors de la chute de l'Union soviétique et la réunification allemande. La révolution tunisienne d'une certaine façon nous le rappelle.

 

J'entends les critiques que vous formulez, et je pourrais, pour y répondre, citer de larges extraits du très beau discours de Lionel Jospin en octobre 1997 lorsqu'il recevait à Matignon le président Ben Ali. Je pourrais aussi évoquer le satisfecit donné au gouvernement de monsieur Ben Ali par Dominique Strauss-Kahn, en octobre 2008, quelques minutes après avoir reçu des mains du chef de l'Etat tunisien une haute décoration. Mais je ne le ferai pas, parce que cela n'est pas à la hauteur du défi que le peuple tunisien doit relever.

 

Le défi que le peuple tunisien doit relever, c'est de réussir une transition démocratique qui soit à la hauteur des espoirs que les Tunisiens ont mis dans le mouvement populaire qu'ils ont engagé et qui les a conduits à faire preuve d'un grand courage et à braver tous les risques. Le sort de la Tunisie est entre les mains des Tunisiens, mais le rôle de la France c'est d'accompagner la Tunisie sur le chemin difficile de la démocratie. Comme le Président de la République l'a rappelé dès samedi, la France est au côté du peuple tunisien.

 

La France souhaite l’organisation d’élections libres en Tunisie, qui sont la seule issue possible à la crise que connaît la Tunisie. Et d’ailleurs, nous sommes prêts à fournir au gouvernement tunisien, s’il le désire, l’assistance nécessaire pour participer à la préparation et à l’organisation de ces élections. Nous voulons ensuite indiquer au gouvernement tunisien que nous sommes décidés à accroître notre effort de coopération économique et culturelle. Nous sommes déjà le premier bailleur de fonds d’aide au développement à la Tunisie. Faire plus, ce sera montrer que nous avons confiance dans le processus démocratique qui est engagé. De la même façon, ce sera montrer que nous avons confiance dans le peuple tunisien, que de dire aux nombreux Français qui résident en Tunisie, que nous les encourageons à rester, à demeurer en Tunisie. Enfin, nous nous engageons dans le cadre de l’Union européenne à obtenir un accroissement de l’aide de l’Union européenne, et surtout l’octroi de ce statut privilégié qui a déjà été accordé au Maroc et qui peut constituer un autre signe pour permettre aux Tunisiens d’avancer sur la voie de la démocratie.

 

Mais mesdames et les messieurs les députés, l’essentiel. L’essentiel c’est la très ancienne et la très forte amitié qui lient la Tunisie à la France, qui lient le peuple tunisien au peuple français. Ce peuple tunisien, ce peuple fier, ce peuple courageux, ce peuple auquel nous lie un héritage millénaire, eh bien, nous voulons solennellement ensemble lui dire que tout est plus fort, que cette amitié est plus forte que tous les régimes, et que nous continuerons de l’aider.

 

Enfin, j’aimerais que l’opposition n’ait pas deux discours d’une région à l’autre de l’Afrique, et n’oublie pas qu’il y a en ce moment en Afrique un chef d’Etat qui a volé les élections et qui doit subir les mêmes critiques de la part de tous les bancs de l’Assemblée nationale.

 

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18 janvier 2011 2 18 /01 /janvier /2011 10:20

 

François Fillon fait le point sur l'accession à la propriété à Rosny-sous-Bois en Seine Saint Denis le lundi 17 janvier 2011.

 

 

Madame et Monsieur les ministres,

Monsieur le Directeur général,

Mesdames et Messieurs les élus,

Monsieur le Maire,

Mesdames et Messieurs,

 

Je remercie Claude Capillon de nous accueillir aujourd’hui à Rosny-sous-Bois car je sais toute l’énergie qu’il déploie pour développer votre ville.

 

En avril dernier, lorsque je suis venu à Bobigny pour inaugurer le nouveau campus de la chambre départementale des métiers, j’ai été frappé par tout ce que ce département recelait comme ambitions et comme potentiel.

 

On parle souvent des difficultés de la Seine Saint Denis. Elles sont indéniables et elles révèlent les fissures notre pacte républicain.

 

Mais il existe aussi dans ce département des initiatives et des projets exemplaires qui se concrétisent tous les jours. Et ils se concrétisent parce que des élus, des services publics, des associations, des entreprises se mobilisent et s’engagent.

 

Il est injuste et il est malsain de présenter la France comme un pays apathique et démoralisé.

Notre nation est pleine de talents, de courage, de volonté. Il faut parler de cela aussi !

 

Il faut savoir souligner les réussites industrielles et scientifiques de notre pays.

Il faut savoir saluer le travail et le sens des responsabilités des Français.

A l’occasion de la crise économique et financière, notre pays n’a ni cédé à la panique, ni relâché ses efforts, ni renoncé aux réformes. Du coup, la France a mieux tenu le choc que bien d’autres Etats européens et elle est aujourd’hui en mesure de saisir la croissance.

 

Les Français ont des raisons d’être fiers d’eux-mêmes et de leur pays.

Et cette fierté ne doit pas être un refuge mais un tremplin pour relever les défis qui sont devant nous: le défi de la compétitivité, le défi du désendettement, le défi de la cohésion républicaine.

 

Aujourd’hui, nous sommes réunis pour parler du logement et des nouvelles facilités pour accéder à la propriété.

 

Pour beaucoup de Français, devenir propriétaire est un rêve, un rêve légitime, mais un rêve difficilement réalisable.

 

Si leurs revenus ont augmenté ces 15 dernières années, les prix de l’immobilier ont augmenté encore plus vite.

 

En 2007, 57% des Français étaient propriétaires.

Depuis, nous avons un peu progressé, mais nous restons très en dessous de la moyenne européenne qui est à 66%.

 

Pour que nos concitoyens puissent plus facilement acquérir leur premier logement, le gouvernement a décidé en 2010 de réformer les aides existantes pour l’accession à la propriété.

 

Le nouveau prêt à taux zéro est offert à tous les candidats à l’acquisition d’un premier logement.

 

Il devrait bénéficier à 380 000 ménages par an, ce qui revient quasiment à doubler le nombre de prêts à taux zéro annuels.

 

Cette réforme va permettre d’augmenter à la fois le nombre de propriétaires et, plus largement, la solvabilité des ménages.

 

En tout, son coût devrait passer de 1,2 milliards d’euros à plus du double, avec un plafond de 2,6 milliards d’euros par an.

 

Je tiens à remercier l’ensemble des professionnels qui ont préparé avec nous cette réforme: promoteurs, banquiers, aménageurs, agents immobiliers, élus et bien d’autres.

Je tiens en particulier à remercier le Crédit foncier pour sa mobilisation qui confirme sa mission historique au service de l’accession sociale à la propriété.

Ensemble, nous avons pu gagner la course contre la montre et respecter le rendez-vous fixé au 1er janvier 2011.

 

La réforme entre dans les faits et son objectif est triple.

D’abord, il s’agit de mieux répondre aux besoins des ménages.

Nous avons voulu une aide de l’Etat simplifiée et plus accessible, avec un produit universel pour les primo-accédants.

 

Nous avons fusionné les trois outils qui existaient jusque là : le prêt à taux zéro, le crédit d’impôt sur les intérêts d’emprunt, et le Pass foncier.

Les critères et les règles de gestion ont été assouplis et l’on a prévu des modes de communication faciles à utiliser, comme le simulateur en ligne ou l’application iphone.

 

Avec cette réforme, il s’agissait aussi de mieux prendre en compte la disparité des situations du logement en France.

 

Vouloir acheter en zone rurale et rechercher un logement en région parisienne, ce n’est pas la même chose ! Le prix du mètre carré peut varier de 1 à 5, voire plus.

Jusqu’ici, les aides à l’accession n’appréhendaient pas suffisamment ce déséquilibre.

Le nouveau prêt à taux zéro va changer cette situation en prenant en compte les différentes situations du marché.

 

Ce que nous visons, c’est un accompagnement de la demande ciblé sur les zones où il est le plus nécessaire.

 

Dans les zones où il n’y a pas suffisamment de logements, comme en Ile de France et dans les agglomérations en croissance, nous allons mettre l’accent sur le neuf : l’aide accordée sera plus importante si l’achat porte sur un logement neuf.

 

L’objectif, c’est d’encourager la construction plutôt que de contribuer à faire grimper les prix de l’immobilier.

 

A l’inverse, dans les zones qui ont moins besoin de nouvelles constructions, nous encouragerons les ménages à acheter dans l’ancien, ce qui permettra d’assurerl’entretien du parc immobilier.

 

Pour tous les logements, dans toutes les zones, le nouveau prêt à taux zéro sera plus puissant que le prêt à taux zéro actuel.

Aucune zone du territoire ne sera pénalisée.

La réforme intègre les impératifs de la politique du logement, mais aussi ceux de l’aménagement du territoire.

 

Le nouveau prêt prévoit aussi une aide renforcée pour les logements les plus performants sur le plan énergétique, qu’ils soient neufs ou anciens

Il entend prévenir l'étalement urbain en encourageant l’achat de logements anciens en zone non tendue.

Je précise que tous les logements resteront éligibles à l’Ecoprêt à taux zéro lorsque des travaux d’amélioration énergétique seront menés.

 

Le cas de Rosny-sous-Bois est emblématique de l'ambition de la réforme: il montre que l’on peut aider les classes moyennes à renouer avec l’accession à la propriété en Ile de France.

Evidemment, il ne règle que partiellement la question de l’endettement. Chacun sait que les ménages des zones tendues comme l’Ile de France doivent s’endetter davantage qu’ailleurs.

 

Aux côtés du nouveau prêt à taux zéro, l’Etat va donc maintenir trois dispositifs complémentaires.

D’abord, le Plan épargne logement, qui permet à ceux qui s’apprêtent à souscrire un emprunt immobilier de se constituer une épargne utile.

11,4 millions de Français y ont recours.

 

Il a été repensé pour favoriser l’achat de résidences principales performantes sur le plan énergétique.

 

Ensuite, nous allons conserver les aides personnelles au logement car elles contribuent à garantir la solvabilité des ménages qui doivent rembourser un emprunt immobilier, et qui ont à affronter un licenciement ou un autre accident de la vie.

 

Enfin, pour favoriser la mixité sociale dans les zones sujettes à des opérations de rénovation urbaine, nous allons préserver l’existence d’une TVA à 5,5%.

Au total, avec l’ensemble des dispositifs, l’Etat consacrera en 2012 plus de 6 milliards d’euros d’aides pour soutenir l’accession à la propriété, contre 3,6 milliards d’euros en 2007.

 

L’étape d’aujourd’hui n’est qu’un premier aboutissement de la réforme.

Nous devons maintenant améliorer l’offre de logements: c’est pourquoi j’ai voulu, avec Nathalie Kosciusko-Morizet et Benoist Apparu, que la réforme s’accompagne de mesures de soutien de l’offre et d’assainissement du marché immobilier.

 

Les premières mesures visent à faciliter la construction de nouveaux logements de qualité dans les zones tendues, et notamment en Ile de France.

 

 

 

 

Avec le plan de relance, 2 milliards d’euros supplémentaires ont été dédiés à la construction en 2009 et 2010, ce qui porte l’effort total de l’Etat pour le logement à plus de 37 milliards d’euros par an sur cette période !

 

Pour la période 2008-2012, nous nous sommes fixés un objectif très ambitieux: produire 70 000 logements neufs en France, dont 6 100 à Paris.

Devant la tension que continue de connaître le logement à Paris, l’Etat a décidé de poursuivre son effort jusqu’en 2016.

 

Quant aux projets de développement urbain innovants, les Investissements d’avenir leur consacrent 1 milliard d’euros: 13 Eco-cités en bénéficieront, qui se sont engagées à accueillir chacune 50 000 habitants.

 

Notre démarche est donc extrêmement volontaire.

Et pour produire le nombre de logements fixé, il va falloir la mobilisation de tous les acteurs. Il faudra aussi prendre en compte la réalité sociologique du territoire, et veiller à ne pas créer d’inégalités sociales ou territoriales.

 

Dans le cadre du Grand Paris, l’État et les collectivités locales négocient actuellement les futurs contrats de développement territorial pour définir des programmes d’aménagement.

 

Ils prêtent une attention précise à l’équipement des territoires, car le projet Grand Paris n’est pas seulement un projet de transports mais aussi un projet au service de la région-capitale, au service de ses habitants et de ceux qui y travaillent.

 

Notre deuxième chantier, c’est la réforme de l'urbanisme issue du Grenelle de l’environnement, à laquelle le Président de la République a redit son attachement.

Cette réforme doit permettre de libérer des terrains constructibles.

Pour cela, nous avons besoin que les maires s’engagent !

Sans leurs initiatives, nous ne pourrons pas organiser le développement d’ensemble des territoires.

 

Je sais que les règles actuelles tendent à favoriser la réduction du nombre de logements constructibles sur un même site.

Pourtant, nous avons permis aux collectivités qui souhaitent construire davantage de dépasser les règles de coefficient d’occupation des sols de 20% à 50% selon le type de logement.

 

Je sais aussi que l’on peut parfois attendre 10 ans avant d’emménager dans un logement acheté sur plan.

Nous avons accéléré les procédures de révision des documents d’urbanisme. 

Aujourd’hui, il ne faut plus que quelques mois pour modifier les règles de constructibilité ou corriger une erreur matérielle !

 

Mais pour en finir avec les lenteurs qui pénalisent les particuliers, il faudra reprendre la multitude de réglementations héritées du passé.

Le droit de l’urbanisme est devenu un maquis impénétrable.

Dans la loi Grenelle, le Parlement a autorisé le gouvernement à simplifier le droit de l’urbanisme par quatre ordonnances.

 

En juin dernier, Benoist Apparu a lancé la démarche «pour un Urbanisme de projet » et installé quatre groupes de travail chargés de formuler des propositions.

Les travaux d’un des groupes ont déjà été traduits dans la loi : la réforme des taxes d’urbanisme a été votée dans la loi de finances rectificative pour 2010.

 

Elle permet de passer d’un régime de 17 taxes et participations financières à deux taxes principales en 2015, et incite à densifier les projets d’aménagement au lieu de pousser à l’étalement urbain.

 

Le besoin de clarification s’applique aussi aux prix des marchés de l’immobilier.

Leur transparence va être renforcée.

C’est le meilleur moyen de lutter contre la spéculation qui profite de l’opacité des prix et du manque d’informations.

 

Les données collectées par les notaires vont venir perfectionner la statistique publique.

Bientôt, on pourra avoir une idée exacte des prix de tous les logements situés sur un territoire choisi.

 

Les Français seront aussi mieux informés sur l’évolution réelle des prix, puisque la qualité des statistiques privées pourra désormais être étalonnée par le conseil national de l’information statistique.

Cette démarche de simplification va dans le sens de nos engagements pris au Grenelle de l’Environnement.

 

Une réforme ne s’arrête pas avec l’annonce de son lancement !

Avec Nathalie Kosciusko-Morizet et Benoist Apparu, j’attache une importance particulière à ce qu’un suivi du nouveau prêt à taux zéro soit mis en place.

L'Agence Nationale d'Information sur le Logement va être sollicitée pour mesurer avec l’appui des notaires l'impact de la réforme sur les prix immobiliers et les modes de commercialisation.

Parallèlement, un suivi statistique rigoureux sera exercé par l’organisme qui supervise la distribution du nouveau prêt à taux zéro par les banques En cas de difficulté, il doit garantir une forte réactivité.

 

Mesdames et messieurs,

 

Cette réforme du prêt à taux zéro et tous ces efforts que nous amplifions pour construire et développer l’offre immobilière, doivent nous permettre de progresser vers une France de propriétaires.

En moins de 15 ans, nous devrions nous rapprocher de la moyenne européenne !

 

C’est pour nous un objectif économique et social, c’est aussi un objectif politique qui répond aux aspirations des classes moyennes, elles qui ont besoin de stabilité, de sécurité, de racines solides pour forger une famille, éduquer leurs enfants, s’impliquer dans la vie locale.

 

Je me réjouis, Monsieur le Maire, d’avoir mesuré avec vous les premiers effets de la réforme du prêt à taux zéro, et je souhaite que beaucoup d’autres Français voient bientôt leurs projets immobiliers se réaliser grâce à cette opportunité.

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14 janvier 2011 5 14 /01 /janvier /2011 17:42

 

 

François Fillon prononce un discours à Guildhall devant la "City of London" le 13 février 2011.

 

 

Mesdames et Messieurs, c’est un grand honneur pour moi de venir m’exprimer à la City de Londres et je veux remercier le Lord Maire et la Corporation de la City d’avoir permis que cette rencontre ait lieu.

La City, c’est la première place financière d’Europe, je veux dire que sa force, c’est un atout pour tous les partenaires européens. Le Royaume-Uni est une grande puissance économique et industrielle qui, comme la France, croit que la mondialisation est un défi qu’il faut relever. Le destin de la France et de la Grande-Bretagne sont des destins qui sont liés. En deux ou trois heures de train, Londres est intégré au plus grand espace économique d’Europe occidentale. Cet espace nous rend plus forts, nous sommes donc comptables de sa vitalité et nous sommes co-responsables de son développement. Britanniques et Français, nous avons la même tâche, nous avons la même responsabilité qui est de sortir de la crise et de renforcer la croissance de l’Europe.

Je suis d’abord venu pour cela, vous dire que la priorité absolue du gouvernement français, c’est la poursuite des réformes que nous avons engagées, sous l’autorité du Président SARKOZY, en 2007, celle des finances publiques bien sûr, mais aussi les réformes économiques et sociales. Des deux côtés de la Manche, je pense que le seul choix responsable pour garantir notre souveraineté à laquelle nous sommes, nos deux pays, tellement attachés, pour garantir notre indépendance économique, le seul choix responsable, c’est la discipline budgétaire. Face à la crise, nous avons été contraints d’apporter un soutien financier massif au système bancaire, puis à notre économie, pour stimuler la reprise. A présent, notre responsabilité, c’est de redresser les finances publiques pour retrouver une croissance durable, sans sacrifier les investissements d’avenir.

Le gouvernement britannique a engagé un programme de redressement budgétaire extrêmement audacieux. Je veux dire que de notre côté, nous avons lancé la politique de limitation des dépenses publiques la plus rigoureuse depuis vingt ans. Nous avons rompu avec le choix du passé, ce choix qui consistait à combler les déficits en accroissant la pression fiscale. Nous avons pris la décision, avec le président de la République, d’écarter toute hausse généralisée de l’impôt. Nous avons gelé les moyens des ministères qui enregistrent donc une décroissance réelle de leurs budgets. Nous avons pris l’engagement de réduire de 10 % en trois ans les moyens de fonctionnement des administrations et de 5 % la première année, c’est-à-dire en 2011. Nous avons, pour la première fois dans l’histoire récente de notre pays, gelé tous les transferts aux collectivités territoriales. Nous poursuivons la politique de non remplacement d’un fonctionnaire sur deux. Nous avons supprimé depuis 2007 100 000 postes dans la fonction publique d’Etat et, sur la période 2011-2013, nous allons supprimer 97 000 postes supplémentaires.

Ces efforts sont dans notre pays des efforts sans précédent. Nous avons atteint, avec l’effet de la crise, un déficit en 2010 de 7,7 % du produit intérieur brut. Les efforts que nous engageons vont nous permettre de revenir à 6 en 2011, à 4,6 en 2012 et à 3 en 2013. Je veux insister devant vous sur notre détermination à respecter cet objectif en 2013. D’ailleurs, cette trajectoire a fait l’objet du vote d’une loi pluriannuelle par le Parlement. Avec le Président de la République, nous sommes totalement engagés à faire en sorte qu’elle soit respectée.

Parallèlement, nous venons de réussir la réforme des retraites. Nous avions, pour préserver nos régimes de retraite, à réaliser des adaptations structurelles. Nous les avons entreprises dès 2007 en réformant ce qu’on appelle dans notre pays les régimes spéciaux. En 2010, nous avons reporté l’âge légal de départ à la retraite de 60 à 62 ans et nous avons fait passer de 65 à 67 ans l’âge de la retraite à taux plein, le tout en préservant notre système de retraite par répartition. Dans un pays qui a la réputation d’être hostile aux réformes, je veux vous faire remarquer que nous avons réussi à mettre en œuvre un rythme de relèvement des seuils d’âge de la retraite qui est entre deux et quatre fois plus rapide qu’en Allemagne, qu’au Royaume-Uni ou qu’aux Etats-Unis.

Bien sûr, il y a eu des oppositions, beaucoup pensaient que nous serions obligés de reculer. Nous ne l’avons pas fait. Nous avons tenu bon parce que cette réforme était nécessaire sur le plan social et financier. Je voudrais d’ailleurs faire remarquer que depuis qu’elle a été votée par le Parlement, ce n’est plus un sujet de contestation et j’ai la conviction absolue que personne ne reviendra jamais sur cette réforme. L’impact de la réforme des retraites sur les comptes publics sera positif dès cette année, puisqu’elle permettra de réduire le déficit public d’environ un demi point du produit intérieur brut en 2013 et environ 1,2 % du PIB en 2020.

Tous ces efforts sont des efforts indispensables, mais pour aller chercher la croissance, nous devons aussi renforcer la compétitivité de notre économie et sa capacité d’innovation. Je voudrais rappeler qu’en la matière la liste des réformes que nous avons engagées depuis 2007 est longue. Nous avons réformé notre droit du travail et nous sommes ainsi sorti du carcan qui était imposé par la loi sur les 35 heures. Désormais, en France, chaque entreprise a la possibilité de négocier à l’intérieur de l’entreprise le temps de travail, dans les limites qui sont prévues par la législation européenne.

Nous avons réformé les services publics en introduisant la rémunération au mérite des agents ou encore, ce qui était impensable en France il y a quelques années, le service minimum dans les transports et dans les écoles en cas de grève. Nous avons réformé l’université française, dont on disait, à juste titre d’ailleurs, qu’elle était politiquement infaisable, puisque beaucoup de ministres – j’en ai été – ont tenté de le faire dans le passé sans y parvenir. Désormais, les universités françaises sont presque toutes autonomes et elles ont pu engager un effort pour recruter elles-mêmes leurs enseignants, chercher les financements complémentaires dont elles ont besoin, ce que toutes les grandes universités du monde faisaient et ce qui n’était pas possible dans notre pays.

Pour améliorer la compétitivité des entreprises, nous avons supprimé ce qu’on appelle la taxe professionnelle, c’est-à-dire un impôt payé aux collectivités locales, cela représente 7 milliards d’euros qui seront économisés par les entreprises en 2010. Pour encourager les entreprises à innover, nous avons triplé le crédit impôt recherche. Les investisseurs étrangers, donc les investisseurs britanniques, ont largement plébiscité cette mesure fiscale. Désormais, la France est l’un des pays les plus attractifs en termes fiscal pour les centres de recherche. Enfin, nous avons lancé un grand programme d’investissements d’avenir qui consacre 35 milliards d’euros de ressources publiques à l’innovation dans tous les secteurs d’avenir, l’université, la recherche, l’industrie, les nouvelles technologies en seront les grands bénéficiaires. Ces investissements publics n’interviennent que couplés avec des investissements privés, c’est donc en gros 65 milliards d’euros qui vont être mobilisés par ce programme d’investissements d’avenir.

Tous ces efforts et toutes ces réformes commencent à porter leurs fruits, puisque nous avons renoué avec la croissance qui devrait atteindre 1,6 % en 2010. En novembre, la production industrielle a progressé comme la consommation de produits manufacturés. Donc, nous avons aujourd’hui toutes les raisons de penser que les objectifs que nous nous sommes fixés de croissance, autour de 2 % en 2011, sont des objectifs atteignables.

Tout est donc fait pour renforcer encore la compétitivité et l’attractivité de la France. Certains l’oublient parfois ou ne veulent pas le reconnaître, mais la France est un pays qui est largement ouvert au monde. Un tiers des salariés du secteur privé travaille pour des entreprises étrangères, la moitié de la capitalisation boursière de la place de Paris est détenue par des entreprises étrangères. Au final, la France et le Royaume-Uni sont parmi les principaux pays d’accueil des investissements étrangers.

Mesdames et Messieurs, nous voulons exploiter toutes les potentialités de notre partenariat avec le Royaume-Uni dans cet esprit d’accroître les capacités d’augmenter la croissance en Europe. C’est la deuxième chose que je voulais vous dire ce matin. Les peuples français et britannique savent que ce qui nous rassemble dépasse de très loin ce qui nous distingue. Ils se souviennent des tranchées de 1914 où sont tombés tant de Britanniques qui reposent en terre de France. Ils se souviennent des heures sombres de 1940 où Winston CHURCHILL avait même offert la fusion entre la France et la Grande-Bretagne. En tout cas, en raison du refus des responsables politiques français, bien mal inspirés, il a offert le soutien du Royaume-Uni à la France libre et au Général de GAULLE. Au fond, à chaque fois, la France et la Grande-Bretagne, malgré toutes leurs différences et malgré toutes leurs querelles, ont su s’unir lorsque l’essentiel était en jeu, en l’occurrence lorsque la liberté du monde était en jeu.

Aujourd’hui, si le temps des conflits meurtriers est derrière nous, nous avons en face de nous un enjeu essentiel qui est la guerre économique mondiale. Si nous voulons maintenir nos modèles économiques, nos modèles sociaux, auxquels nous sommes tellement attachés, si nous voulons conserver un certain leadership dans le monde, nous avons le devoir de continuer à nous rapprocher et à nous faire confiance. Nous avons engagé une coopération en matière de défense, dont je voudrais dire devant vous qu’elle est de celle qui ne peut exister qu’entre des nations sœurs. On ne peut pas aller aussi loin dans la coopération, sur des sujets aussi essentiels que la dissuasion nucléaire, si on n’a pas une confiance totale les uns dans les autres. Le 2 novembre 2010, le Président SARKOZY et le Premier ministre CAMERON ont signé ici, à Londres, deux traités qui sont des traités de portée historique en matière de coopération, de défense et d’accès à des installations nucléaires communes.

Avec cette étape, nous nous engageons dans la voie d’un rapprochement encore plus étroit qui respecte la souveraineté britannique et qui respecte la souveraineté française. Je suis convaincu que dans cet esprit, nous n’avons pas tous encore pris la mesure du degré d’interaction atteint par nos industries de défense. Les gouvernements britannique et français viennent de signer une feuille de route qui est faite de projets très concrets. Nos industriels sont partie prenante à ces programmes et vont pouvoir augmenter leur poids face à la concurrence internationale. Pour la France, ce rapprochement est bon ; pour la Grande-Bretagne, ce rapprochement est bon ; je crois qu’il est aussi bon pour l’Europe et qu’il est aussi bon pour l’OTAN.

Le renforcement de l’intégration franco-britannique ne connaît donc aucun obstacle et aucun tabou. Près de 2 500 entreprises britanniques emploient plus de 250 000 personnes en France et 1 500 entreprises françaises implantées au Royaume-Uni ont plus de 330 000 salariés. Il faut des tempêtes de neige ou des nuages de cendres pour nous rappeler de temps à autre que l’Angleterre est une île, tant la réalité économique fait que nos marchés ne font qu’un.

Je voudrais prendre l’exemple du marché de l’énergie. EDF ENERGY produit aujourd’hui un quart de l’électricité britannique et gère huit centrales au Royaume-Uni. Il compte mettre en service un premier réacteur EPR en 2018 et en construire quatre d’ici 2025. C’est à partir de cette assise franco-britannique que nous pourrons construire un leader mondial pour les centrales de troisième génération, capable de répondre avec un niveau de sécurité sans précédent aux exigences d’un monde qui a besoin de toujours plus d’énergie, mais en même temps qui a besoin de toujours moins de carbone. Tout cela englobe les sous-traitants, des centaines de sociétés britanniques et françaises spécialisées dans les technologies de pointe à haute valeur ajoutée et qui sont les entreprises qui vont créer les emplois de demain.

Pour renforcer cette compétitivité commune – c’est la troisième chose que je voudrais vous dire – le premier cadre pertinent qui s’impose à nous, même si ce n’est pas le seul, c’est l’Europe. Avec l’Allemagne, le Royaume-Uni et la France sont les leaders de la recherche en Europe et nous avons le devoir de continuer à encourager l’innovation. Mais aujourd’hui, nous devons faire face à des obstacles que nous devons ensemble lever. Le coût de l’enregistrement d’un brevet est dix fois plus élevé en Europe qu’aux Etats-Unis. Cela va changer. Puisqu’une dizaine d’Etats européens, dont le Royaume-Uni et la France, viennent de proposer une coopération renforcée pour créer un brevet de l’Union européenne beaucoup moins cher. La France a aussi proposé que l’on crée un Fonds européen des brevets et un Fonds européen de capital risque pour les entreprises innovantes. Je souhaite et j’aurai l’occasion de le dire au Premier ministre David CAMERON tout à l’heure, que le Royaume-Uni s’engage pleinement à nos côtés pour promouvoir ces projets qui visent au fond à mieux utiliser l’argent européen, à mieux utiliser la force de l’Union européenne sur des projets qui encouragent directement la croissance.

Tous ces projets illustrent la volonté commune de la France et de la Grande-Bretagne de réformer le budget européen. En décembre, nous avons cosigné, avec trois autres Etats membres, une lettre demandant la stabilisation du budget de l’Union européenne pour les prochaines perspectives financières. Nous croyons que des politiques européennes ambitieuses sont compatibles avec un budget stable et nous croyons que l’enjeu des prochaines négociations budgétaires, ce ne sera pas de dépenser plus, mais ce sera de dépenser mieux. D’ailleurs, comment expliquer à nos concitoyens qu’au moment où nous devons engager un effort très important de réduction de nos dépenses publiques, l’Union européenne augmenterait les siennes.

C’est la raison pour laquelle la France propose de réorienter une partie des crédits de recherche de l’Union européenne vers des actions qui soient beaucoup plus directement utiles aux entreprises. C’est la raison pour laquelle nous devons lutter pour une mise en œuvre moins bureaucratique des principales politiques européennes, à commencer par celle de la recherche et de l’innovation. Dans cette logique, il me parait indispensable que toute nouvelle proposition de réglementation européenne soit désormais obligatoirement accompagnée d’une étude d’impact centrée sur la compétitivité des entreprises. Pendant trop longtemps, en effet, il y a eu un empilement de normes européennes sans aucune vision d’ensemble sur les effets sur les entreprises. Je pense que, ensemble, Français et Britanniques, nous pouvons faire évoluer cette situation.

Evidemment, la stabilité et le dynamisme de la Zone Euro sont une autre condition de la prospérité de l’ensemble des Etats européens. La Zone Euro, c’est le cœur monétaire de l’Europe et je voudrais que personne ne puisse douter de la détermination de l’Union européenne tout entière à la préserver. C’est une priorité politique, c’est une priorité économique absolue. La réaction collective, qui a été la nôtre en 2010 pour venir au secours d’Etats membres qui étaient exposés à une crise de liquidités, a prouvé cette détermination et cette solidarité. Nous avons, en effet, pris des mesures massives d’assistance à la Grèce et à l’Irlande. Nous avons mis en place un Fonds européen de stabilisation financière pour trois ans. Ces mesures d’urgence ont prouvé la capacité de réaction et la capacité d’adaptation de l’Europe. Mais en même temps, elles ont montré la nécessité de mettre en place des mesures plus structurelles. D’abord, des mesures plus structurelles pour renforcer la surveillance collective des Etats de la Zone Euro. La crise irlandaise a montré qu’il était nécessaire d’étendre cette surveillance au-delà des seuls critères de budget et de dette, en traitant les risques de déséquilibre macroéconomique majeur. Ce dispositif de surveillance renforcée fait en ce moment l’objet d’une traduction législative qui doit aboutir d’ici le mois de juin prochain.

Ensuite, il fallait pallier les évidentes lacunes en matière de supervision financière européenne. La fragilité de certaines banques européennes dans la tourmente a prouvé qu’on ne pouvait pas continuer à se reposer entièrement sur les superviseurs nationaux, alors que des problèmes systémiques dans certains Etats membres peuvent avoir et ont presque toujours des conséquences sur l’ensemble de l’Europe. En quelques mois, l’Union européenne a fait plus de progrès qu’en vingt ans en adoptant un système complet de supervision financière, avec trois agences européennes dotées de pouvoirs propres, dont l’Agence européenne de supervision bancaire, basée ici, à Londres, et un Conseil européen du risque systémique présidé par la Banque centrale européenne. Franchement, qui aurait parié sur ce résultat il y a seulement deux ans ?

Enfin, les Etats européens, qu’ils soient membres ou pas de la Zone Euro, ont réalisé qu’ils ne pouvaient plus improviser face à l’urgence. Même si les improvisations qui ont été les nôtres, en particulier la Grande-Bretagne et la France, en 2008, ont été efficaces. En décembre 2010, les vingt-sept Etats membres de l’Union européenne ont lancé une procédure simplifiée de révision du Traité de Lisbonne, pour autoriser les Etats de la Zone Euro à établir un mécanisme permanent de stabilité à partir de 2013. Toutes ces initiatives prouvent que les Etats membres de la Zone Euro sont convaincus que l’euro les protège. Je lisais dans la presse britannique ce matin que je voulais demander à la Grande-Bretagne de sauver l’euro, c’est une interprétation un peu excessive de mes propos, je ne pense pas que l’euro ait besoin d’être sauvé, je pense que l’euro a besoin d’être défendu. C’est ensemble que nous pourrons le faire parce que nous y avons un intérêt commun.

L’euro, pour les Etats qui l’ont adopté, c’est un des fondements du marché unique. C’est un atout clé pour les opérateurs économiques qui peuvent bénéficier d’économies d’échelle sans risque de change. C’est enfin et surtout un élément vital de la construction européenne. Pour toutes ces raisons, les Etats membres, en particulier la France et l’Allemagne, n’ont pas hésité à proposer des solutions courageuses et innovantes. A ce sujet, il ne doit y avoir aucun doute, les Etats de la Zone Euro, particulièrement la France et l’Allemagne, sont prêts à tout mettre en œuvre, je dis bien absolument tout, pour assurer la stabilité de la Zone Euro.

Mais tout au long de cette crise, je veux aussi dire que les autorités britanniques ont été des partenaires solides, dans le respect de nos différences. Elles mesurent l’exceptionnelle interdépendance des économies européennes. Elles connaissent le rôle majeur joué par la City de Londres dans les transactions en euro. Elles savent que l’insularité monétaire n’existe pas, pour un pays dont la moitié des exportations est à destination de la Zone Euro. Le Royaume-Uni a donc pris toute la part qui lui revient à l’effort commun, en acceptant une révision limitée du Traité et en contribuant aux plans d’urgence récents, je pense en particulier à l’Irlande. Je voudrais rendre hommage à ces actions énergiques et nécessaires qui ont largement contribué à renforcer la crédibilité de l’euro, la crédibilité de la Zone Euro et la crédibilité de l’Union européenne tout entière.

Mais le redressement de l’économie mondiale ne peut pas être durable s’il ne s’accompagne pas d’une meilleure régulation économique et financière. La bonne gouvernance, elle s’applique aux institutions, elle s’applique aux Etats, en Europe comme ailleurs. Mais elle s’impose aussi aux opérateurs économiques et financiers. Je sais toutes les crispations que peut susciter le débat sur la régulation financière. Je sais que certains auraient voulu qu’il n’ait jamais eu lieu. Je sais que d’autres veulent le circonscrire très strictement. D’autres, enfin, voudraient que les règles nouvelles, auxquelles le G20 a souscrit, restent des lettres mortes. Je veux dire que ce n’est pas l’approche de la France. Pendant notre présidence du G20, nous souhaitons poursuivre, avec tous nos partenaires, un agenda ambitieux en matière de régulation financière.

Je crois que nous devons tous être conscients que le système capitaliste, auquel nous sommes attachés, est passé très près de l’effondrement, en tout cas très près du gouffre. Il est peu probable que les opinions publiques française, britannique, allemande, européenne puissent accepter un statu quo, c’est-à-dire puissent accepter de consentir à financer de nouveau les effets d’une nouvelle secousse qui interviendrait simplement parce que les mêmes causes produisent les mêmes effets et parce qu’aucune règle n’est venue tenir compte des enseignements de la crise. Si ce n’est pas nous, nous, les Européens, avec vous, les Britanniques, qui régulons, si ce n’est pas nous qui encadrons, si ce n’est pas nous qui cherchons à moraliser le système, alors, je vous le dis, ce seront les adversaires de la liberté économique qui auront toutes les chances de se faire entendre dans nos pays.

L’objectif n’est évidemment pas d’étouffer l’innovation financière. Nous savons bien que cette innovation financière est une des sources de nos économies et de nos entreprises. Ce que nous voulons simplement, c’est une meilleure maîtrise des risques et c’est davantage de responsabilités. Meilleure maîtrise des risques à travers une transparence accrue et à travers un contrôle plus efficace des comportements à risque. Davantage de responsabilités pour que, en cas de défaillance, ce ne soit pas les finances publiques qui soient exposées comme elles l’ont été indûment dans cette crise. Notre objectif est également, en réduisant les arbitrages règlementaires, de développer la concurrence en la situant là où elle doit exclusivement se situer, c’est-à-dire dans la capacité à fournir le meilleur service au meilleur prix et non pas dans l’exploitation de différences de réglementations dans le seul but de loger les risques d’un côté et les revenus de l’autre.

Je pense que nous avons accompli de réels progrès sur cette voie. En deux ans, depuis la première réunion du G20 à Washington, nous nous sommes dotés de nouvelles règles en matière de capital et de liquidités des banques. Nous avons renforcé l’encadrement des produits dérivés, le contrôle de la titrisation, la lutte contre les paradis fiscaux et nous avons mieux encadré les bonus des opérateurs de marché. Au plan européen, après la réorganisation institutionnelle de la supervision, des discussions importantes sont en cours sur la question des régimes de résolution des institutions bancaires, sur les infrastructures post-marché ou encore sur les ventes à découvert. Il faut que ces efforts se poursuivent, sans céder à la tentation de les remettre en cause.

Je veux dire que notre objectif au sein du G20 sera double. D’abord, nous voulons veiller à une bonne mise en œuvre des réformes qui ont déjà été décidées et qui ont déjà été engagées par le G20. Je pense que c’est une question d’intégrité du système financier international et une question d’égalisation des conditions de concurrence entre les acteurs de marché et les places financières. Ensuite, nous chercherons à étendre l’agenda de la régulation là où il reste insuffisant. Nous proposerons de renforcer la régulation du système bancaire parallèle, qu’on appelle le « shadow banking », pour contrecarrer le risque que nos efforts pour renforcer la régulation du secteur bancaire traditionnel, ne conduise finalement qu’à reporter l’activité et à reporter le risque sur de nouvelles formes d’intermédiation bancaire qui, elles, échapperaient complètement à la régulation. Nous proposerons également à nos partenaires de renforcer le « volet marchés » de l’agenda de régulation financière du G20, dans la continuité des travaux européens en faveur d’une meilleure transparence et d’une protection accrue de l’intégrité des marchés.

Voilà, Mesdames et Messieurs, très simplement, ce que je voulais vous dire ce matin. Je vais, tout à l’heure, rencontrer le Premier ministre David CAMERON et le vice-Premier ministre Nick CLEGG. La France sait qu’elle a avec le gouvernement britannique un partenaire fiable, courageux, pragmatique. Nous savons qu’aucun Etat européen ne peut aujourd’hui se replier dans je ne sais quel splendide isolement. Donc, c’est en nous alliant, c’est en travaillant ensemble entre partenaires que nous pouvons exercer un leadership en Europe et dans les institutions internationales. Je crois que les résultats de notre coopération de ces derniers mois montrent que, sur ce chemin, la France et la Grande-Bretagne avancent sur la bonne voie.

 

 

déclaration de François FIllon lors de sa visite à Londres le 13 janvier 2011.

 

 

François Fillon et David Cameron répondent aux questions de la presse après leur entretien au 10 Downing street à Londres le 13 janvier 2011.

 

 

Monsieur le Premier ministre, je voudrais d’abord vous remercier de l’entretien que nous venons d’avoir et de l’accueil chaleureux que vous m’avez réservé.

C’est mon premier déplacement au Royaume-Uni en tant que Premier ministre, je veux dire à la presse française que ça n’est quand même pas tout à fait un évènement historique, car je suis déjà venu en Grande Bretagne accompagner un Premier ministre qui était Jean-Pierre RAFFARIN, je crois en 2003 et 2004, je crois que le Premier ministre Dominique De VILLEPIN est venu en Grande Bretagne en 2005.

J’ai indiqué tout à l’heure à David CAMERON que je pense que nous devons intensifier les rencontres entre nos deux gouvernements. Nous devons d’autant plus le faire que la qualité des relations franco-britanniques a atteint un niveau rarement égalé, grâce en particulier au sommet franco-britannique de Londres et aux accords historiques qui ont été passés en matière de défense, et dont j’ai eu l’occasion de dire à plusieurs reprises qu’ils ne pouvaient avoir lieu qu’entre deux nations sœurs, c'est-à-dire des nations dont le niveau de confiance est tel qu’elles peuvent mettre en commun des choses aussi fondamentales que leur sécurité.

J’avais déjà eu l’occasion de rencontrer David CAMERON à Paris en 2008 alors qu’il était le chef de l’opposition. Et j’avais déjà pu apprécier à cette occasion le sens des responsabilités qui l’animait.

En le rencontrant aujourd’hui je retrouve ses qualités auxquelles j’ajouterais le courage et la capacité de leadership. Et c’est la première chose que j’ai dit à David CAMERON tout à l’heure, c’est que le Gouvernement français est très admiratif de la politique économique et financière qui est conduite en Grande Bretagne, du courage avec lequel le Gouvernement britannique a engagé cet effort de redressement budgétaire. Je suis certain qu’il portera ses fruits, pour la Grande Bretagne naturellement, mais aussi pour l’ensemble de l’Union européenne. Et je veux dire de ce point de vue, que c’est un réconfort pour le chef du Gouvernement français que de pouvoir comparer les politiques qui sont conduites en matière financière, en matière budgétaire, en matière économique et constater que des deux côtés de la Manche, elles sont finalement très proches.

J’ajoute que nous sommes, français comme britanniques, très sourcilleux de notre indépendance, nous sommes très sourcilleux de notre souveraineté nationale. Eh bien notre souveraineté nationale passe d’abord par la réduction de nos déficits et par le retour à l’équilibre de nos finances publiques.

Nous avons ensuite évoqué la question de l’euro. Je veux redire de nouveau que l’euro n’a pas besoin d’être sauvé. L’euro a besoin d’être défendu. Et pour défendre l’euro nous avons besoin, à l’intérieur de la zone euro, de renforcer notre coopération. Les gouvernements de la zone euro ont besoin de mettre en place un pilotage économique de cette zone.

Nous avons besoin de rapprocher progressivement dans une vision de long terme nos fiscalités, notre organisation du travail, notre organisation économique. On ne peut pas imaginer sur le long terme une zone euro avec le maintien de différences aussi grandes en matière de temps de travail, en matière d’âge de la retraite, en matière d’organisation économique, de fiscalité. Et donc si on veut que la zone euro se consolide il faut impérativement que l’on rapproche les législations dans ces domaines. Et ce que j’ai indiqué à David CAMERON c’est que nous souhaitons que la Grande Bretagne observe, regarde, soutienne ces efforts avec enthousiasme parce que c’est l’intérêt de la Grande Bretagne que d’avoir une zone euro forte.

Naturellement je ne suis venu demander à David CAMERON ni aide ni modification de la politique de la Grande Bretagne s’agissant de l’euro mais un regard positif sur cet effort d’harmonisation, de cohérence, que nous allons entreprendre.

Nous avons évoqué la question du budget européen pour constater que nous étions complètement en ligne sur la nécessité de ne pas augmenter le budget européen. Et sur la nécessité de réorienter une partie des dépenses de l’Union européenne vers des actions plus efficaces en matière de soutien à la croissance.

J’ai en particulier évoqué trois idées que la France veut défendre au cours de cette année 2011 : le fonds européen des brevets, la mise en place d’un fonds de capital risque pour les PME innovantes et l’obligation pour la Commission et pour l’Union européenne de réaliser des études d’impact avant chaque décision pour constater quels sont les effets des décisions européennes, des normes décidées par l’Europe sur nos entreprises.

Enfin, nous avons évoqué nos coopérations bilatérales et en particulier la possibilité de rapprocher nos secteurs industriels notamment dans le domaine nucléaire en raison de la coopération très étroite qui existe désormais entre la France et la Grande Bretagne sur ces sujets.

Et puis nous avons évoqué la lutte contre le terrorisme et je voudrais remercier David CAMERON pour le message de solidarité qu’il a adressé au Président de la République française et qu’il vient de renouveler à la suite des dramatiques incidents qui se sont produits au Niger et qui montrent à quel point nos démocraties doivent s’unir pour défendre ensemble leurs valeurs. Puisque dans ces évènements tragiques, ce n’est pas le Gouvernement français qui est attaqué, ce sont les valeurs des démocraties et ce sont ces valeurs-là que nous partageons.



Réponse du Premier ministre François FILLON

La coopération entre la France et la Grande Bretagne dans la lutte contre le terrorisme est très étroite, elle est ancienne. Elle n’a cessé de se renforcer et nous avons évoqué ensemble la nécessité de la renforcer encore, notamment concernant la zone sahélienne. L’objectif, s’agissant de la zone sahélienne, c’est d’éviter à tout prix que ces mouvements terroristes étendent considérablement leur influence au détriment des Etats existants, au détriment des structures publiques qui sont déjà très fragiles dans cette région du monde. Nous voyons bien que nous sommes à un moment clé où ces Etats ont besoin d’être encouragés, ont besoin d’être renforcés, ont besoin d’être aidés dans la lutte contre le terrorisme. Et nous souhaitons y travailler très étroitement ensemble avec la Grande Bretagne.

S’agissant de la situation en Tunisie, puisque c’est la question que vous posez, je veux dire que nous sommes extrêmement préoccupés par cette situation, par la violence qui s’est développée depuis quelques jours. Nous appelons instamment l’ensemble des parties à faire preuve de retenue, à choisir la voie du dialogue. On ne peut pas continuer dans cette utilisation disproportionnée de la violence et le Gouvernement français fait tous ces efforts pour convaincre le Gouvernement tunisien de s’engager dans cette voie. Je note avec intérêt que des mesures ont déjà été annoncées, en particulier la libération des personnes qui avaient été arrêtées au début des émeutes. Il faut absolument progresser dans cette voie. Et enfin j’ajoute que, au-delà des problèmes politiques intérieurs à ces pays, qui doivent être résolus par la voie la plus démocratique, il y a un problème de développement économique. Et ces problèmes sont liés. Et là, nous avons une action que nous pouvons conduire ensemble, l’Union européenne, pour apporter des aides au développement plus efficaces à cette région du Maghreb, avec laquelle nous avons des liens historiques, que chacun connaît bien.



Réponse du Premier ministre François FILLON

Si votre question peut se résumer à la question suivante : est-ce que la politique d’assimilation que j’ai toujours défendue, peut fonctionner avec une femme anglaise ? La réponse est non.

Deuxièmement, il ne faut quand même pas exagérer les différences entre nos deux pays. Je disais tout à l’heure qu’il y a beaucoup de coquetterie dans la mise en avant de nos divergences. La vérité est que depuis des années nous avons progressé les uns vers les autres en termes d’organisation, et même en termes idéologiques. Je pense que la Grande Bretagne reconnaît aujourd’hui qu’il est nécessaire parfois de donner des impulsions pour mettre en œuvre des filières industrielles, et la France a fait beaucoup d’efforts pour ouvrir son marché. C’est aujourd’hui un des pays les plus ouverts du monde, en tout cas un des pays les plus ouverts en Europe, et j’en faisais la démonstration ce matin en m’exprimant à la City.

Troisièmement, comme vient de le dire David à l’instant, nous ne demandons pas à la Grande Bretagne de rentrer dans la zone euro. Et l’effort de cohérence, nécessaire à l’intérieur de la zone euro, ne concerne pas la Grande Bretagne. Ce que nous demandons c’est que la Grande Bretagne, comment dirais-je, ne s’offusque pas de cet effort. Ne le considère pas comme dangereux pour elle. Ne le considère pas comme une sorte de différence qui pourrait s’installer entre la zone euro et les pays qui n’y sont pas.

Nous avons fait deux choix différents. A l’époque ce choix était très discuté dans mon pays, j’ai fait partie de ceux qui s’y étaient opposés. Et lorsque nous nous opposions à ce choix, avec un certain nombre de responsables politiques français, nous disions très exactement ce qui est en train de se produire aujourd’hui, c'est-à-dire qu’on peut avoir une monnaie commune à condition d’avoir un gouvernement économique commun, à condition d’avoir une politique économique harmonisée, à condition d’avoir plus de convergence fiscale et sociale.

Eh bien aujourd’hui on y est, on est devant une obligation historique, celle de consolider cette zone euro et donc nous devons aller vers cette convergence. Mais nous comprenons parfaitement que les Anglais veuillent rester des Anglais. Et encore une fois, même si nous ne le comprenions pas, nous ne parviendrions pas à vous convaincre du contraire.



Réponse du Premier ministre François FILLON

C’est une préoccupation pour tous les gouvernements européens, j’ai envie de dire c’est une préoccupation pour tous les démocrates dans nos pays qui ne peuvent pas voir d’un bon œil monter finalement une intolérance et une sorte de repli sur soi qui ont toujours mené dans l’histoire à de très mauvais résultats. Et donc nous sommes mobilisés pour lutter contre la montée de ces extrémismes et la meilleure façon de lutter contre la montée de ces extrémismes c’est de dire la vérité, d’assumer les politiques que nous conduisons, d’affronter la réalité.

C'est la raison pour laquelle à la tête du Gouvernement français je n’ai cessé de défendre une politique de rigueur, une politique d’assainissement des finances publiques, parce que c’est une nécessité pour défendre la souveraineté nationale, pour défendre l’indépendance nationale. C’est la raison pour laquelle j’ai toujours soutenu une politique qui défende notre identité nationale à l’intérieur de l’ensemble européen.

J’évoquais tout à l’heure les convergences nécessaires des politiques fiscales, des politiques sociales, des politiques économiques. Aucune de ces convergences ne revient à remettre en cause les différences essentielles, culturelles qui existent entre nos peuples et qui doivent s’additionner. Et enfin j’ajoute que nous avons évoqué la lutte contre le terrorisme, la montée de cet islamisme radical, qui vient jeter une lumière, qui est une mauvaise lumière, sur toute une région du monde. Notre coopération pour lutter contre la montée de cet islamisme radical, notre coopération pour essayer d’apporter des réponses aux conflits qui sont à l’origine de la montée de cet islamisme radical, sont aussi des réponses à la montée de ces mouvements extrémistes.



Réponse du Premier ministre François FILLON

Je voudrais à mon tour dire toute ma confiance dans le gouvernement de monsieur SOCRATES et indiquer à quel point il y a un caractère irrationnel dans une partie des attaques contre les pays de la zone euro. Comme David vient de le dire à l’instant, la zone euro n’est pas la plus endettée du monde, et le Portugal conduit aujourd’hui, et depuis plusieurs mois, une politique extrêmement rigoureuse de réduction de la dépense publique, de réorganisation de son économie, qui correspond parfaitement aux attentes qui étaient celles de l’ensemble des partenaires européens. Est-ce qu’il y a besoin d’argent supplémentaire aujourd’hui ? La réponse est non. Il y a un fonds qui a été mis en place, il y a surtout toute une série de démarches en terme de discipline budgétaire, de surveillance de ce que les Etats font, qui doit maintenant être réalisée.

On doit passer des déclarations, des accords de principe à la mise en oeuvre précise des mécanismes qui vont permettre de surveiller ce que les Etats font, et le cas échéant d’obtenir les corrections de trajectoire nécessaires. Si demain des besoins supplémentaires apparaissaient ce que j’ai dit, ce que le président de la République française a dit à plusieurs reprises, et ce que la Chancelière allemande a également répété, c’est que nous ferons tout pour consolider l’euro, tout, absolument tout ce qui sera nécessaire.

Par rapport à l’attitude de la Grande Bretagne je n’ai aucune remarque à faire sur la coopération de la Grande Bretagne qui, au fond, a joué pleinement le rôle qui devait être le sien depuis le début de cette crise. Je rappelle d’ailleurs que c’est la Grande Bretagne et la France qui, au début de la crise financière, ont pris les décisions, les initiatives nécessaires qui ont permis d’éviter que la crise ne connaisse une aggravation bien supérieure à ce que nous avons connu. Et aujourd’hui le gouvernement de David CAMERON a fait exactement ce qu’il fallait faire, pour que la solidarité européenne soit totale, tout en tenant compte du fait que la Grande Bretagne n’est pas dans la zone euro et qu’elle n’a pas les mêmes responsabilités de ce fait.

 

François Fillon s'exprime devant la communauté française d'Angleterre à Londres le 13 janvier 2011.

 

 

Mes chers compatriotes.

 

Je voudrais vous dire que c’est un immense plaisir de vous retrouver au terme de la visite que je viens d’effectuer et qui m’a permis de m’entretenir avec le Premier ministre David CAMERON et le vice-Premier ministre Nick CLEGG et de dialoguer ce matin avec les milieux économiques à la City.

Et je voudrais d’abord remercier Maurice GOURDAULT-MONTAGNE parce qu’il a organisé cette rencontre. Mais aussi et surtout et je pense que personne ne me démentira, parce qu’il œuvre chaque jour avec beaucoup de talents et beaucoup d’efficacité au service de l’amitié franco-britannique. Je suis venu à Londres pour poursuivre la dynamique politique qui a été initiée par la visite du président SARKOZY en mars 2008, il y a maintenant près de trois ans. Vous savez que depuis cette visite, le partenariat historique qui existe entre la France et la Grande Bretagne a été considérablement renforcé. Je pense évidemment aux spectaculaires traités de coopération en matière de Défense, qui ont été signés au mois de novembre dernier et qui engagent un rapprochement fondamental au service de nos deux pays, de la Défense européenne et de l’Alliance atlantique. Je pense aussi au rachat de British Energy par EDF, faisant naître un géant mondial, un champion industriel capable d’aborder tous les grands marchés de l’énergie. Je pense à la manière dont les dirigeants français et britanniques ont pris toutes leurs responsabilités depuis le début de la crise économique mondiale. Chacun se souvient que c’est la Grande Bretagne et la France qui ont été à l’origine des premières décisions qui ont permis d’éviter que la crise économique et financière que nous avions connue soit encore plus grave que ce qui s’est déroulé.

 

Nous sommes confrontés à des défis qui sont des défis communs et nous avons l’obligation d’unir nos forces pour sortir définitivement de la crise, pour gagner ensemble la bataille de la croissance, de l’innovation et de l’emploi. Nous devons unir nos forces pour faire entendre notre voix sur la scène internationale : je veux dire la voix de l’Europe et la voix de ces vieilles démocraties européennes qui ont un message. Nous devons unir nos forces pour accroître la puissance européenne à un moment où le continent est à un tournant de son histoire qui lui impose d’améliorer ses capacités de décisions et ses capacités d’actions. Pendant des décennies l’Europe s’est interrogée sur elle-même. Chaque nation défendant ses théories institutionnelles, ses préférences politiques, ses acquis personnels. Ces débats entre nous étaient légitimes. Ils étaient aussi le signe d’une Europe qui s’estimait suffisamment prospère pour prendre son temps, pour épiloguer, pour chicaner, pour hésiter. Mais la force de la mondialisation, la montée en puissance des pays émergents, la crise économique et financière sont venues percuter toutes ces tergiversations et aujourd’hui l’Europe n’est plus un choix à géométrie variable, c’est une exigence vitale pour nos vieilles nations.

A l’heure où des continents entiers se dressent, où ils progressent à toute allure, à l’heure où la perspective de voir la Chine doubler les Etats-Unis sur le plan économique, devient maintenant crédible et avec un calendrier que l’on peut à peu près imaginer, la question est pour nous d’une limpidité absolue : est-ce que dans dix ans, dans quinze ans, dans vingt ans, l’Europe sortira de l’Histoire, ou est-ce qu’elle continuera d’exister, c’est-à-dire de peser et de rayonner et d’influencer la civilisation mondiale.

Aucune nation européenne ne peut occulter cette question fondamentale et donc aucune ne peut se soustraire à ses responsabilités face à l’aventure européenne. Dire cela ça n’est pas renier les singularités et les traditions de chaque nation. Comme la France, le Royaume Uni a la fierté nationale chevillée au corps, mais nous devons aujourd’hui plus que jamais miser sur ce qui nous rapproche pour préserver nos ambitions dans le monde. La France et le Royaume Uni sont complémentaires, ils sont indispensables l’un à l’autre. Nous avons besoin d’une relation fraternelle, d’une relation dynamique. Et cette relation c’est pour une très large part sur vous qui êtes rassemblés ici ce soir, qu’elle repose.

 

La communauté française au Royaume Uni est par le nombre, la première au monde des communautés françaises expatriées. Il n’est d’ailleurs pas certain que l’on ne puisse jamais parvenir à la dénombrer exactement. Notre administration consulaire comptabilise 118.000 Français immatriculés mais personne ne sait avec certitude si les Français du Royaume Uni sont 300.000, 400.000. Ce qui est sûr en tout cas, c’est que les Français qui vivent ici font de Londres une des dix plus grandes villes de France par la population.

A travers vous, à travers les activités qui sont les vôtres, la France projette ses forces. Elle projette aussi une image, une image d’ouverture, une image de dynamisme, une image de diversité et donc vous contribuez autant à la richesse de la Grande Bretagne qu’à celle de notre pays. Il y a vingt ans, vous vous en souvenez, un ouvrier français et un ouvrier britannique échangeaient une poignée de main sous La Manche. Le forage du tunnel s’achevait. Je crois qu’on peut dire que ce tunnel a entrainé un changement radical de la géographie et des mentalités, quand toutefois il n’y a pas d’incident qui vient en compliquer le fonctionnement. Il a démultiplié les échanges économiques et culturels. Il a renforcé l’activité de la Grande-Bretagne et de Londres en particulier, ce qui montre d’ailleurs que toutes les craintes qui avaient été exprimées se sont révélées vaines, comme c’est souvent le cas.

 

Parmi les Français qui viennent s’installer ici beaucoup sont de jeunes gens qui veulent perfectionner leur anglais, qui veulent décrocher leur premier emploi salarié. Ils sont souvent animés par un esprit d’entreprise qui les honore. Mais nous savons aussi que pour certains d’entre eux, ceux qu’on a pu appeler « les oubliés de Saint-Pancras » il arrive que la confrontation à la réalité déçoive les rêves et les espérances. Je veux dire que leur courage mérite notre soutien, et j’appuie les efforts qui sont faits pour faciliter leurs recherches d’emploi et leur insertion. Je sais que vos six conseillers élus à l’Assemblée des Français de l’étranger ainsi que votre Consul général, Monsieur Edouard BRAINE, accordent une très grande attention à leurs difficultés et je veux les en remercier. Je veux aussi rendre hommage sur ce sujet, à l’action originale et à l’action novatrice du Centre Charles PEGUY.

Au fond, de l’innovation qui caractérise les Français au Royaume Uni, peut être que l’un des meilleurs exemples c’est l’effort collectif qui inspire le « plan école ». Toutes les composantes de la communauté française, soutenues par vos élus du Sénat de l’Assemblée des Français de l’Etranger s’y sont associées pour développer l’offre scolaire.

La qualité exceptionnelle de l’enseignement au lycée Charles de GAULLE, crée une demande de places qui est en augmentation constante et vous savez bien qu’il aurait été impossible dans le contexte budgétaire actuel, comme sans doute dans un autre d’ailleurs, de financer de nouvelles places dans l’enseignement public français à Londres, sans avoir recours à un partenariat public-privé novateur.

Je trouve d’ailleurs que ce n’est pas illogique que beaucoup d’entre vous, qui venez dans ce pays attirés par ses caractéristiques économiques et sa philosophie économique, aient eu l’intelligence de promouvoir ce partenariat public-privé novateur. Je veux donc saluer la réussite de votre projet qui se concrétisera tout d’abord à la rentrée prochaine par l’ouverture d’un nouveau collège qui accueillera 700 élèves dans le nord de Londres. Je veux vous féliciter pour cette première étape d’une opération qui connaîtra, j’en suis sûr, d’autres développements en Grande-Bretagne et qui peut être un exemple pour d’autres pays dans lesquels j’espère que votre initiative sera imitée.

 

Vos associations jouent un grand rôle pour maintenir les liens qui existent entre vous. Je veux rendre hommage à la Fédération des Associations françaises de Grande-Bretagne qui est un partenaire précieux de l’action de l’Etat.

Je veux aussi honorer les Anciens Combattants et ceux de la France Libre. Certains d’entre-vous furent les témoins et les acteurs de l’épopée du Général de GAULLE. Je suis, je ressens de l’émotion à les rencontrer. Vous avez sauvé l’honneur de votre pays. Vous avez fondé d’une certaine façon la relation franco-britannique sur les valeurs sacrées de l’Indépendance et de la dignité humaine. La France n’oublie pas ceux qui ont combattu pour sa Liberté et elle n’oublie pas qu’à Londres, la Flamme de la Résistance a éclairé la conscience de ceux qui ne se résignaient pas à la victoire de la barbarie.

 

Vous vivez Mesdames et Messieurs dans un pays qui est depuis des siècles au premier rang dans la conquête et la défense des libertés politiques. Et vous vivez dans un pays qui est depuis des siècles un des moteurs de la dynamique de l’économie mondiale. Vous mesurez donc sans doute mieux que quiconque ici quels sont les enjeux et quelles sont les conséquences de la mondialisation et vous mesurez ici à quel point la puissance d’une nation est liée à sa modernité.

Je crois qu’il est inutile d’occulter que certains de nos compatriotes se sont installés en Grande-Bretagne parce qu’ils avaient le sentiment qu’ils n’auraient pas dans notre pays les mêmes moyens pour réaliser leurs aspirations. Ils ont quitté une France qui se reposait beaucoup sur le souvenir d’une grandeur acquise ; qui retardait le moment de regarder en face la réalité du monde. Une France qui négligeait de mesurer ses forces et ses faiblesses et souvent d’engager les réformes nécessaires.

Depuis quatre ans avec le Président de la République, nous avons engagé la France dans une entreprise profonde de modernisation.

La première année du quinquennat a été celle de la libération des énergies et de la remise en question d’un certain nombre de nos vieux mythes : de l’autonomie des universités à l’assouplissement des 35 heures, de l’instauration d’un service minimum dans les transports et à l’école en cas de grève à la réforme des régimes spéciaux de retraite. Nous avons remis en mouvement la société française. Et au fond, on peut être pour ou contre les réformes que nous avons réalisées, mais personne ne peut nier qu’il y a une dynamique qui s’est instaurée et que la France d’aujourd’hui n’a plus les mêmes résistances – même si elle en a toujours – en tout cas plus les mêmes, plus avec la même force face aux changements.

La deuxième année, cela a été parce que cela nous a été imposé, l’année de la résistance à la crise que nous avons plutôt mieux négociée que beaucoup de nos partenaires européens. Grâce en particulier au plan de relance que nous avons engagé.

Et la troisième année a été celle de la recherche de la compétitivité indispensable pour sortir maintenant de la crise et cela a été aussi l’année de la réforme des retraites. C’était une réforme indispensable et je pense qu’ici on le mesure peut-être mieux qu’ailleurs. Indispensable sur le plan social, indispensable sur le plan financier. Bon, il y a eu des protestations. Je veux dire que dans notre pays, c’était inimaginable qu’il n’y en eût pas. Mais nous n’avons pas cédé. Et nous n’avons pas cédé, non pas par autoritarisme, simplement parce que nous pensons qu’il y a des moments où l’intérêt général commande d’être ferme et je note d’ailleurs que depuis que cette réforme a été votée par le Parlement, le débat s’est évanoui et est passé naturellement à autre chose.

L’année 2010 a été aussi l’année où est apparue la crise des dettes souveraines. Cette crise a confirmé l’impératif que j’avais à plusieurs reprises évoqué, de réduire nos dépenses publiques. C’est ce que nous faisons. Nous menons la plus sévère politique de limitation de dépenses publiques jamais réalisée dans notre pays depuis vingt ans. C’est une nécessité financière parce que le poids des déficits pèse sur la croissance ; parce que le poids des déficits menace notre modèle social. C’est une nécessité politique parce que nous sommes farouchement attachés à notre indépendance et à notre souveraineté et un pays qui est trop endetté perd une partie de sa souveraineté et une partie de son indépendance, parce qu’il est soumis justement au jugement et à la loi des marchés. C’est une nécessité morale parce que nous n’avons pas le droit de reporter sur nos enfants la responsabilité de gérer ce qui finalement aurait été notre imprévoyance.

 

Grâce à nos efforts, alors que nous avons aujourd’hui un déficit de 7,7% du PIB, nous serons à 6% en 2011, à 4,6% en 2012 et nous descendrons à 3% à 2013, avec une loi de finances pluriannuelle, votée par le Parlement à la fin de l’année 2010, qui fixe chacune des étapes de cette trajectoire. Et donc pas à pas nous sommes en train de sortir de la crise.

L’action du gouvernement et le travail des Français commencent à porter leurs fruits. Pour l’année 2010 nous aurons une croissance qui sera de l’ordre de 1,6%. Et pour l’année 2011 la cible des 2% est à notre portée. Il n’est pour autant question de diminuer nos efforts.

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11 janvier 2011 2 11 /01 /janvier /2011 18:59
François Fillon a présenté aux familles et proches des deux Français tués au Sahel "le témoignage de la compassion et de l'amitié fraternelle de la Nation tout entière." lors des questions d'actualité à l'Assemblée nationale le mardi 11 février 2011.

 

 

Monsieur le Président de l’Assemblée nationale,

Mesdames et Messieurs les députés,

Monsieur le député François LONCLE,

 

 

 

La France est bouleversée par l'assassinat de Vincent et d'Antoine. Deux jeunes Français, deux jeunes Français généreux, deux jeunes Français heureux de vivre, heureux de partager, réunis en vue d'un mariage, le mariage d’Antoine avec Rakia, une jeune Nigérienne. Quel symbole ! Celui d'une humanité rassemblée, celui d'un monde sans frontières ethniques et sans frontières culturelles. Je voudrais présenter à la famille, aux proches des victimes, le témoignage de la compassion et de l'amitié fraternelle de la Nation toute entière.

 

Monsieur LONCLE, je voudrais vous remercier et remercier toutes les formations politiques de notre pays qui ont choisi de faire preuve de solidarité dans l'épreuve que nous traversons. Je vais vous parler, simplement : quand on prend une décision aussi lourde que celle que nous avons prise avec le Président de la République et le ministre de la Défense, les responsables de nos armées, et qu’à l'issue de cette décision nous connaissons le drame que nous venons de connaître, eh bien cela nous a fait chaud au cœur d'entendre dès dimanche matin plusieurs responsables de l'opposition manifester un grand sens des responsabilités et un grand sens de l'intérêt général. Il aurait été tellement facile d'exploiter cette situation, vous ne l'avez pas fait, c'est tout à votre honneur, c'est à l'honneur des responsables politiques, et c'est à l'honneur de notre pays.

 

Je voudrais ajouter en plus que c'est la meilleure réponse à apporter à la violence des terroristes, car ce qui est visé dans toutes ces attaques, ce n'est pas le Gouvernement français, c'est la France, c'est plus largement la démocratie, ce sont les valeurs que nous représentons. Et en faisant preuve d’une grande unité nationale, je pense que nous contribuons beaucoup à combattre ce terrorisme et à accroître la sécurité de nos concitoyens à travers le monde.

 

Monsieur LONCLE, je veux vous répondre clairement, comme je l’ai fait hier : nous n’avons pas changé de stratégie et la France ne veut pas, se refuse à entrer dans une logique binaire. A chaque prise d’otages, nous étudions les possibilités de monter une opération de sauvetage, et à chaque fois nous essayons d’évaluer quelles sont les chances de réussir cette opération.

 

Je veux vous rappeler que nous avons conduit des opérations de sauvetage parmi les premiers, contre les pirates somaliens. Lorsque les 2 journalistes ont été enlevés en Afghanistan, nous avons pendant plusieurs jours mis en place les moyens nécessaires pour conduire une opération de sauvetage, que malheureusement nous n’avons pas pu réaliser, compte tenu de la situation. Et enfin, lorsque les Français ont été enlevés à Arlit, nous avons tenté une opération, en tous cas nous avons préparé une opération de sauvetage, mais nous n’avons pas pu repérer les véhicules des ravisseurs qui se sont évanouis dans le désert, et donc cette opération n’a pas pu être conduite. Je veux dire par là que pour nous, il ne peut pas y avoir une attitude de principe seulement. Bien sûr, nous défendons d’abord, les valeurs qui sont les nôtres et nous refusons le chantage des terroristes, mais en même temps, nous sommes attachés à la vie de nos concitoyens et chaque fois que cela est nécessaire, nous engageons des discussions pour assurer leur sécurité.

 

Enfin, quant à la coopération avec les pays de la région, je veux dire que l’attitude du Gouvernement nigérien a été exemplaire. C’est d’ailleurs une des raisons qui nous a conduit à décider de cette opération, en soutien à la demande du Gouvernement nigérien. Il faut aider les gouvernements de cette région qui ont énormément de difficultés à affronter, en raison en particulier de la pauvreté, il faut les aider à consolider l’Etat de droit, parce que si les forces terroristes gagnent du terrain au Sahel, alors c’est la souveraineté même, c'est-à-dire l’existence de ces Etats qui est menacée. Et avec l’Union européenne, nous avons entrepris une démarche commune pour augmenter notre effort, notre effort en matière de développement et notre effort en matière de sécurité à l’égard de ces pays.

 

 

 

 
  François Fillon rappelle que la France "lutte contre des terroristes qui combattent les valeurs qui sont les nôtres, la liberté, le progrès, la tolérance" lors des questions d'actualité à l'Assemblée nationale le mardi 11 janvier 2011.

 

Monsieur le Président,

Mesdames et Messieurs les députés,

Monsieur le député Christian VANNESTE,

 

 

Je voudrais vous remercier d’avoir été, avec le maire de Linselles et le préfet de la région dans les premiers instants pour porter l’amitié et la fraternité de la République auprès des familles éprouvées.

 

Je voudrais rappeler les faits. Vendredi, deux jeunes Français ont été enlevés dans un restaurant en plein cœur de Niamey, dans une zone qui n’était pas considérée jusqu’à maintenant comme une zone à haut risque. Très vite, les ravisseurs ont été poursuivis par les forces de sécurité nigériennes. Très vite aussi, les forces de sécurité nigériennes ont fait une demande officielle auprès du gouvernement français pour obtenir l’assistance militaire de la France. Nous avons apporté cette assistance sous force de renseignements ; les avions permettant d’observer les véhicules ont décollé et en mettant en alerte des forces capables d’intervenir.

 

Une première tentative a été faite par les forces nigériennes pour tenter de stopper les ravisseurs, elle a échoué. Au cours de cette tentative, d'ailleurs, un officier nigérien a été blessé. Au moment où nous avons constaté que les ravisseurs allaient quitter, et avaient d'ailleurs déjà quitté le territoire du Niger, s'engager au Mali et se rapprocher des zones-refuges où sont sans doute retenus les otages français qui ont été enlevés à Arlit, et dont nous savons que ce sont des zones qui sont extraordinairement difficiles d'accès, nous avons pris la décision d'intervenir.

 

30 militaires français héliportés et parachutés, sont entrés en contact avec cette colonne, il y a eu des combats extrêmement violents, et à l'issue de ces combats qui ont été très brefs, les ravisseurs ont été neutralisés, mais nos soldats ont découvert les corps sans vie exécutés des deux Français. Je dis « exécutés », selon toutes les indications qui m'ont été fournies, à la fois par les militaires français et par les médecins qui les ont examinés, mais naturellement une autopsie aura lieu dans le cadre de l'enquête qui est en cours. 4 ravisseurs ont été tués, 2 ont été fait prisonniers, ils ont été remis aux autorités nigériennes, qui actuellement les interrogent avec le concours de la justice française.

 

La décision que nous avons prise, je veux le redire à nouveau, c’est une décision difficile, mais que nous ne pouvions pas ne pas prendre, pour plusieurs raisons.

D’abord parce qu’il y avait une demande expresse du gouvernement nigérien. Je veux rappeler que chaque jour depuis plusieurs années, nous demandons aux gouvernements de cette région de s’organiser pour lutter efficacement contre le terrorisme. Nous les aidons à former leurs forces de sécurité, nous leur fournissons du matériel, ce n’est pas au moment où ils avaient engagés clairement une action contre les ravisseurs que nous devions refuser de les aider.

Deuxièmement, nous savons que c’est dans cette période du trajet de départ et avant que les ravisseurs passent la frontière malienne qu’il y avait le plus de chance de sauver la vie des 2 otages.

Enfin, je veux dire que la meilleure façon d’assurer la sécurité des Français dans cette région, c’est aussi de montrer de la fermeté dans l’engagement des pays de la région et de la France à lutter contre le terrorisme, et c’est aussi en pensant à la sécurité de nos concitoyens dans cette région que nous avons décidé d’agir.

 

Voilà, mesdames et messieurs les députés, ce qui s’est produit. Les aléas d’une opération militaire n’ont pas permis qu’elle se termine heureusement. Mais je veux dire qu’avec le Président de la République et l’ensemble du Gouvernement, j’assume la décision qui a été prise parce que, je crois que nous luttons contre des terroristes qui combattent les valeurs qui sont les nôtres, la liberté, le progrès, la tolérance et nous ne devons pas piétiner ces valeurs.

 

 

 
François Fillon a rendu hommage aux soldats français qui sont intervenus pour tenter de sauver les otages français au Niger lors des questions d'actualité à l'Assemblée nationale le mardi 11 janvier 2011.

 

 

Monsieur le Président,

Mesdames et Messieurs les députés,

Monsieur le Président SAUVADET,

 

 

Il n’est pas facile de répondre trois fois sur le même sujet mais j’ai tenu à le faire parce que je veux aussi vous manifester ma gratitude pour la position qui est celle de votre groupe.

 

Vous me permettez d’abord de rendre hommage aux militaires français, à ceux qui ont été engagés dans cette opération comme à tous ceux qui assurent la sécurité de nos concitoyens partout à travers le monde. J’ai rendu visite ce matin aux deux militaires français qui ont été blessés, relativement légèrement, dans cet affrontement, et qui sont hospitalisés à Paris. J’ai pu constater une nouvelle fois la force de caractère, la qualité de l’engagement qui sont la caractéristique de nos soldats. Et je voudrais que nous ayons une pensée aussi pour tous ceux qui, notamment dans cette région, nous permettent d’accéder aux renseignements, qui est la première des réponses à la violence du terrorisme.

 

Je voudrais ensuite dire que nous avons donné, sous l’autorité de Madame ALLIOT-MARIE, des consignes extrêmement fermes à nos compatriotes pour qu’ils réduisent au maximum leurs déplacements dans cette zone. Nous avons d’abord étendu ce qu’on appelle la zone orange, c'est-à-dire celle où les déplacements ne sont conseillés que pour des raisons impératives. Ce qui exclut le tourisme, ce qui exclut tous les déplacements qui peuvent être évités. Les tours operators seront réunis dans quelques jours. Je veux dire très solennellement devant vous que leur responsabilité personnelle est engagée. Nous avons depuis plusieurs mois mis en garde les tours operators contre les voyages dans cette région, certains acceptent les conseils du Gouvernement, d'autres considèrent qu'ils connaissent mieux la région que nos diplomates et nos experts, je veux leur rappeler que c'est leur responsabilité pénale, qui est engagée, si jamais demain il y a un accident.

 

Deuxièmement nous avons demandé aux entreprises françaises, qui emploient des personnels dans cette zone, de prendre toutes mesures nécessaires à leur sécurité. Là aussi les entreprises ont une responsabilité, elles ne peuvent pas envoyer des personnels dans n'importe quelles conditions. Et enfin, nous avons demandé aux gouvernements des pays concernés d'accroître la sécurité autour des zones qui sont fréquentées par les Français, c'est notamment ce que monsieur Juppé a fait hier au Niger.

 

Enfin, je veux vous redire qu’à l'initiative de la France, huit pays européens ont signé une lettre commune adressée à madame Ashton dans le courant de l'automne, pour lui demander de présenter au Conseil européen un plan complet de soutien au développement et à la sécurité dans les pays du Sahel. Ce plan sera présenté en février, et je pense qu'il permettra de concrétiser un engagement beaucoup plus fort de l'Europe en faveur de cette région.

 

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10 janvier 2011 1 10 /01 /janvier /2011 18:40

 

François Fillon présente ses vœux à la presse le lundi 10 janvier 2011 à Matignon.
 

Madame la Présidente,

Mesdames et Messieurs,

Samedi deux Français sont morts, après avoir été pris en otages au Niger. C’est un drame et je pense aux parents des deux jeunes réunis dans la perspective du mariage de l’un d’entre eux. Je pense à la jeune fiancée nigérienne. Le terrorisme a brisé leur vie.

Et pourtant, comme l’a dit le Président de la République hier, cela ne saurait entamer notre détermination à lutter contre ce fléau. La faiblesse n’est pas une solution, bien au contraire, l’irrésolution ne peut qu’accentuer la pression à l’égard de notre démocratie et de nos compatriotes à l’étranger. Chaque fois que nous sommes confrontés à des prises d’otages, je veux vous dire que nous pesons avec beaucoup de gravité les avantages et les risques d’une opération de sauvetage. Je veux remercier les autorités nigériennes d’avoir mobilisé leurs forces avec notre soutien pour tenter de libérer nos compagnons. Mais les preneurs d’otages, lorsqu’ils se sont vus poursuivis, ont éliminé froidement les otages, selon les premiers éléments dont je dispose. Bien sûr, l’enquête sera approfondie. Et tous les résultats seront communiqués aux familles.

Mais cela doit nous rappeler à notre devoir de vigilance. Les Français en zone sahélienne doivent redoubler de prudence. Le Quai d’Orsay reprendra fermement la diffusion des consignes indispensables. Alain JUPPE est à Niamey pour faire le point avec les autorités nigériennes et pour rencontrer la communauté française. Il portera le témoignage de la fermeté du gouvernement français et de son implication pour la sécurité de nos compatriotes expatriés face au terrorisme. Je recevrai ce soir, à 18 heures, les représentants du Parlement pour faire le point de la situation et pour répondre à leurs interrogations. Je sais que l’émotion est forte, mais je me félicite de voir que les élus et les observateurs font preuve d’une grande responsabilité et d’un sens élevé de l’intérêt national.

Mesdames et messieurs, voilà donc la quatrième édition des vœux que je vous présente en tant que Premier ministre, et j’ai été sensible aux propos de votre présidente qui laissent à croire que rien ne change pour que tout change. En tout cas, je ne crois pas avoir changé et je n’ai pas l’intention de le faire.

Il y a un quinquennat de mission auquel je me suis toujours senti lié et dont j’assume, sous l’autorité de Nicolas SARKOZY, les succès et les épreuves. Peut être ressentez-vous une pointe de lassitude devant cette continuité politique ? Mais c’est précisément cette continuité qui est originale dans le fonctionnement de nos institutions. La stabilité du pouvoir exécutif, ça n’est peut-être pas très «décoiffant», mais c’est un atout qui permet d’être concentré sur nos objectifs : la reprise économique et la sécurisation de la zone euro, la cohésion sociale et la réduction des déficits, la réforme de la dépendance, celle de la justice et la réforme fiscale qui sera présentée en mai au Conseil des ministres et débattue au parlement en juin prochain.

Notre devoir est d’arriver en 2012 avec un bilan aussi solide que possible. Un bilan d’abord économique avec une croissance retrouvée et libérée des turbulences de la crise. Un bilan social ensuite, avec un taux de chômage en baisse progressive, un régime de retraites consolidé, un système plus complet de prise en charge de la dépendance. Un bilan financier marqué par des déficits réduits de près de moitié en 2012 par rapport à 2009. Un bilan diplomatique avec un rayonnement international renforcé par notre présidence du G20. Et enfin, un bilan culturel marqué par une France désormais accoutumée à l’idée que la réforme continue est vitale à son progrès.

Et à cet égard, je veux dire que je crois sincèrement que la légitimité du changement a davantage progressé dans notre pays en l’espace de quatre ans qu’au cours des vingt dernières années. On peut être pour ou contre les réformes que nous avons réalisées, mais personne ne peut nier que nous avons fait sauter des verrous psychologiques et que nous avons réintroduit du mouvement dans la société française. L’augmentation de l’âge de départ à la retraite, l’autonomie des universités, le service minimum obligatoire, la démocratisation de la représentativité syndicale sont autant d’avancées qui sont venues bousculer de très vieux mythes.

Eh bien, ce mouvement ne sera pas stoppé. Et je veux vous dire, avec le Président de la République que nous voulons faire de l’année 2011 une année utile pour la France. Qu’est ce qu’une année utile ? C’est une année qui continue d’entretenir l’énergie de la réforme qui caractérise ce quinquennat. A l’approche des échéances électorales, tout gouvernement est tenté de ralentir le rythme. Eh bien, nous faisons au contraire le pari de rester dans l’action ; pari risqué, allez-vous me dire, pari pourtant nécessaire, parce que je crois qu’il serait fou de nous croire en situation de donner du temps au temps, mais aussi parce que l’opinion française est souvent beaucoup plus cruelle pour ceux qui choisissent la prudence, que pour ceux qui choisissent l’audace.

Une année utile, c’est aussi une année pour consolider notre action. J’ai eu l’occasion de dire que nous n’avions pas à rougir de ce qui a été fait depuis 2007, mais pour autant, je mesure parfaitement les attentes et les frustrations qui traversent le pays. Pour les uns, nous sommes allés trop vite et trop loin, et pour les autres, nous sommes allés trop lentement et trop timidement. Eh bien, entre ces deux thèses, nous devons expliquer où en est la société française, nous devons mettre en lumière ce qu’elle a su réaliser depuis 2007 et ce qu’elle doit encore réaliser avec un objectif, qui est celui du maintien de son modèle économique et social face à la mondialisation qui accentue sa pression. C’est sur la base de ce bilan que nous développerons une vision cohérente de l’avenir.

Et si je parle de cohérence, c’est parce que les grands défis français transcendent les échéances électorales : le défi de la compétitivité, le défi du désendettement, le défi du vieillissement, le défi du développement durable, le défi de l’identité de la France, le défi de l’Europe politique. Tous ces sujets, nous avons commencé à les traiter, mais il faut de la durée et de la ténacité pour aller au bout de nos réponses.

Pour cela, nous serons partiellement aidés par l’opposition, puisque 2011 s’annonce comme une année des programmes politiques. Les Français vont enfin pouvoir juger des propositions des uns et des autres. La critique du Président de la République et du Gouvernement ne suffira plus, le temps de la comparaison, et – je l’espère – du débat de fond, va pouvoir commencer. Continuer de réformer, consolider le bilan, tracer des perspectives, voilà ce que nous appelons avec le Président de le République une année utile. A contrario, l’année inutile, ce serait une année de piétinement et de reculade, ce serait une année qui serait dominée par l’attentisme et par l’électoralisme ; en un mot, ce serait une année contraire à ce que nous sommes et à ce que nous savons faire. C’est-à-dire agir et oser, mais aussi dire la vérité sur les risques qu’il nous faut juguler.

A cet égard, chacun voit bien que l’année 2011 va réclamer une très grande maîtrise politique. Sur le plan européen, l’exigence de maîtrise est évidente. Avec l’Allemagne, la France a un rôle éminent à jouer pour sécuriser l’euro et l’Europe. Ça signifie trois choses : renforcer l’union politique en structurant la gouvernance de l’Union ; accentuer nos efforts sur l’investissement, notamment en réorientant les programmes européens de recherche pour maximiser leur effet sur l’industrie ; et enfin, imposer sur le plan budgétaire une trajectoire vertueuse à tous les Etats européens.

L’instabilité des marchés financiers suscite des controverses sur l’euro ; controverses auxquelles je veux répondre, parce que je suis inquiet du scepticisme qui entoure l’Union européenne. Et n’ayant pas voté pour le traité de Maastricht, je crois ne pas être suspecté, ne pas pouvoir être suspecté de dogmatisme en la matière.

Cette crise n’est pas la crise de l’euro, c’est avant tout la crise de pays qui ont été affaiblis par la récession économique qui a révélé et qui a amplifié les lacunes de leurs modèles de croissance. Dans la plupart des Etats européens, les ajustements sont devenus inévitables et nous ne devons pas laisser croire qu’ils ne seraient pas intervenus si ces pays n’avaient pas appartenu à la zone euro. Pour tout dire, cette crise ne remet en cause ni la pertinence de l’euro, ni les bienfaits apportés par plus de dix années de stabilité des changes. Dois-je aussi rappeler que lorsque l’on examine la situation des finances publiques de la zone euro dans son ensemble, elle est moins dégradée que celle des Etats-Unis ou du Japon, tant en termes de déficit qu’en termes de dette. La volonté des pays membres de la zone euro est forte. L’ampleur des mesures qui ont été adoptées ces derniers mois ou qui sont en cours d’adoption le prouve. L’euro, c’est un projet irrévocable, et les difficultés que nous rencontrons, je veux leur voir, au moins, un mérite : celui de relancer le principe d’une direction politique renforcée de l’Union européenne et d’une plus grande intégration des pays qui en partagent la même monnaie.

Sur le plan national, la maîtrise politique sera là aussi de mise pour accompagner la reprise. Pour l’année 2010, la croissance française devrait être proche de 1,6%. Nos prévisions sont donc vérifiées. Pour 2011, selon l’INSEE, la croissance de la zone euro devrait se modérer d’ici juin sous l’effet du ralentissement des débouchés à l’exportation et de la mise en œuvre des mesures de redressement des finances publiques. Pour l’heure, en l’absence d’une aggravation de la crise des dettes souveraines en 2011, l’objectif d’une croissance de notre économie de 2% continue d’être à notre portée. En novembre, la production industrielle a progressé de 2,3 % et la consommation des produits manufacturés est en hausse de 2,8 %. Le climat des affaires, tel qu’il est mesuré par l'INSEE, a poursuivi en décembre sa progression notamment dans l'industrie, où l'indice dépasse désormais sa moyenne de long terme. L'ensemble des indicateurs montre que la croissance de l'économie française s'est accélérée au quatrième trimestre, et que cette tendance favorable devrait se poursuivre en 2011.

Cet objectif de croissance exigera un pilotage très serré : d’un côté, nous allons nourrir le développement de notre économie avec la suppression de la taxe professionnelle, qui va permettre d’injecter 4,3 milliards d’euros dans les entreprises en 2011, et avec les investissements d’avenir, qui vont donner lieu cette année à l’engagement de 15 à 20 milliards d’euros, et de l’autre, nous respecterons scrupuleusement nos engagements en matière de réduction des déficits.

Parce qu’il n’est pas envisageable d’augmenter notre pression fiscale, qui est déjà l’une des plus élevées de tous les pays européens, nous menons la plus sévère politique de limitation des dépenses publiques jamais réalisée depuis 20 ans dans notre pays : gel en valeur des moyens des ministères, des transferts aux collectivités territoriales ; réduction des dépenses de fonctionnement et d’intervention des administrations de 10% en 3 ans, dont 5% cette année ; poursuite du non remplacement d’un départ à la retraite sur deux dans la Fonction publique de l’Etat, dont je voudrais indiquer que les effectifs passent cette année sous la barre des deux millions et reviennent à leur niveau du début des années 90 ; réduction des niches fiscales, avec dix milliards d’euros d’économies dès 2011 ; monopole fiscal des lois de finances, afin de mettre fin à la multiplication intempestive et permanente des dispositions fiscales dans tous les projets de loi. C’est une sorte de révolution pour les finances publiques françaises. Grâce à ces efforts, alors que nous avons atteint un déficit en 2010 de 7,7 du PIB, nous reviendrons à 6 en 2011, à 4,6 en 2012, et à 3% en 2013.

Sur le plan social, maîtrise politique encore, car nous voyons bien que notre cohésion peut se déliter sous le coup des insatisfactions, en particulier des insatisfactions nées de la crise, ou au contraire, s’affermir aux premières lueurs de la croissance. Tout au long de la récession, je constate que notre pacte a tenu le choc, mais en même temps, chacun sent bien que des fêlures le fragilisent. L’emploi, et notamment l’emploi des jeunes, demeure notre principal défi. Les partenaires sociaux sont invités à nous faire des propositions. Ils y travaillent et nous pourrons, en concertation avec eux, proposer des nouvelles mesures dans les semaines à venir. Les formations politiques ont, elles aussi, un rôle de proposition. Et comme l’a souligné le Président de la République, « il n’y a aucun sujet tabou !»

J’ai noté avec intérêt les déclarations des uns et des autres sur les 35 heures. La France à un problème de compétitivité et elle a un problème de financement de son pacte social ; il est donc parfaitement légitime de s’interroger sur les conditions de l’activité, elle qui constitue le principal instrument de création de richesse nationale. On ne pourra pas à moyen terme défendre nos industries, maintenir notre pacte social, réduire nos déficits sans être encore plus productif. Et j’ajoute qu’on ne pourra pas éternellement avancer dans l’intégration économique, fiscale et sociale de l’Europe et maintenir en même temps entre nos Etats des écarts flagrants en matière d’organisation du travail. Toute réflexion sur la durée légale du travail doit donc s’inscrire dans le cadre d’une analyse plus globale sur la convergence européenne.

Dans ce débat sur les 35 heures, il faut regarder les choses sans dogmatisme et sans excès. Il faut prendre en compte l’ensemble des paramètres qui ne se résument pas à la seule durée d’activité, mais aussi à la qualité de l’activité, il faut écouter les entrepreneurs, il faut écouter les syndicats de salariés, parce que ce sont eux qui sont au cœur de l’organisation du travail, et enfin, il faut mesurer les évolutions que nous avons introduites depuis 2003 et s’appuyer sur elles pour aller éventuellement plus loin.

Je veux rappeler que la loi de 2008 a tout renvoyé aux accords d'entreprise. En matière de durée du travail, les accords d’entreprise, depuis 2003, s'imposent aux accords de branche, on ne peut donc plus dire qu’il y a un verrou de la branche, comme on le connaissait auparavant. Les accords d'entreprise peuvent tout faire, dans le respect des durées maximales – 48 heures par semaine ou 44 heures sur 12 semaines – fixer le nombre d'heures supplémentaires, les mécanismes de modulation et les mécanismes d'aménagement du temps de travail sur l'année. Donc les assouplissements existent, et les possibilités d’aménagement ne demandent qu’à être utilisées.

Alors pourquoi ne le sont-elles pas suffisamment ? D’abord, parce que des compromis ont été rudement négociés sur le terrain et que chacun craint de bousculer les équilibres. Ensuite, parce que les allégements de charges permettent aux entreprises de tenir debout malgré les RTT, mais je voudrais cependant préciser sur ce point que ces allégements financent moins les 35 heures qu’elles ne soutiennent aujourd’hui les emplois peu qualifiés. La sortie des 35 heures ne résoudrait donc que partiellement le problème du coût du travail de ces emplois peu qualifiés. Je veux donc dire aux entreprises qu’il est hors de question de remettre en cause ces allégements qui sont un élément clé de notre compétitivité. Enfin, si les assouplissements ne sont pas pleinement utilisés, c’est peut-être aussi parce que la récession a figé les positions.

Avec le retour de la croissance, il y aura à nouveau du «grain à moudre», et on peut penser que des négociations dans les entreprises vont se réenclencher. Et si tel n’était pas le cas, je veux dire, avec beaucoup de force, que c’est au niveau de l’entreprise, et non de façon directive et unilatérale, qu’il faudra imaginer des solutions nouvelles pour mieux organiser le temps de travail en renforçant la liberté conventionnelle et en modernisant les dispositions du Code du travail.

L’autre débat qui a suscité de vifs commentaires est celui de l’emploi à vie des fonctionnaires. Que la Fonction publique ait besoin d’être modernisée est certain. Mais il ne faut pas radicaliser des oppositions factices ! Et il ne faut pas laisser entendre que l’Etat distribuerait des rentes à vie. Nous avons une Fonction publique de carrière, recrutée par concours, qui fait l’armature d’un Etat impartial, avec une culture du service public et une compétence que beaucoup de gouvernements étrangers nous envient. Ça ne doit évidemment pas nous empêcher de développer de la souplesse pour la gestion des administrations, avec l’intervention de contractuels, et d’ailleurs, nous le faisons. Cela ne veut pas dire que les fonctionnaires titulaires sont propriétaires de leur poste et de leur rémunération, c’est à l’Etat d’affecter ses fonctionnaires en fonction de leurs compétences et de développer la part de leur rémunération et de leur carrière fonction de leurs mérites et de leurs résultats, en tenant compte de leur engagement professionnel.

A côté de l’emploi, la question de l’unité républicaine nous renvoie une fois de plus vers des socles fondamentaux auxquels je crois profondément, l’Education, la politique de la ville, la sécurité, l’immigration, l’assimilation, dont la loi sur la Burqa constitue l’un des instruments.

Enfin, sur le plan politique, l’approche des échéances nationales peut être, soit, une source de revivification démocratique ou bien de crispation idéologique. Ça sera sans doute les deux. Là encore, nous devrons faire preuve de maîtrise, en évitant de sombrer dans des affrontements inutiles ou brutaux. Et dans cet esprit, les élections cantonales ne devront pas être, plus que de raison, détournées de leurs enjeux locaux.

Bref, l’année 2011 sera sensible, et il reviendra au Gouvernement de gérer les affaires de la France avec beaucoup de sang froid. Ça sera d’autant plus nécessaire que nous serons soumis à une surchauffe préélectorale qui n’est jamais la meilleure des inspiratrices. L’approche des élections est toujours propice à un émiettement du pays qui voit les intérêts corporatistes se réveiller et être sollicités. Nous devrons défendre l’intérêt général, assurer la cohérence de la politique nationale et résister aux élans de la démagogie. Il va falloir répondre à la radicalisation de nos adversaires. D’un côté, il y aura la gauche qui va accentuer ses critiques afin de conforter sa base la plus militante, et en cela, je crains que les primaires socialistes ne soient pas vraiment une source de modération. De l’autre côté, il y aura l’extrême droite qui va tenter une percée à l’instar de ce qui s’est passé dans plusieurs Etats européens. J’ai eu l’occasion de rappeler que le Front National ne doit pas seulement être combattu sur le plan des principes, mais bien sur l’inconséquence de son projet économique et social. Son mélange d’ultra protectionnisme, d’ultra libéralisme et d’ultra étatisme est tout simplement incohérent. Entre ces deux radicalités, le Gouvernement et la majorité devront opposer une ligne politique sérieuse, mais aussi donner encore plus de sens à leur action.

2011 doit être une année de ressourcement intellectuel et politique. C’est un travail que nous devrons mener au gouvernement, mais surtout au sein de tous les partis de la majorité présidentielle qui ont vocation à développer ensemble une stratégie pour 2012. Je ferai tout pour coordonner et pour unifier les initiatives de la majorité, parce que si la diversité a sa légitimité, elle a aussi ses limites politiques. Conformément à ce que le Président de la République a annoncé, nous devrons être à l’automne prochain en mesure de cristalliser nos choix et de rassembler nos forces.

Mesdames et messieurs, les années passent, mais les difficultés de la presse doivent encore et toujours être surmontées. Dans le monde, plusieurs de vos confrères étrangers subissent la loi du silence. En Afghanistan, Hervé GHESQUIERE et Stéphane TAPONIER sont toujours retenus en otages. Nous avons tous été scandalisés par l’accusation d’espionnage portée contre eux, eux qui ne faisaient en Afghanistan que leur devoir d’informer. Je pense à leurs familles, je pense à leurs proches, et je mesure la douleur d’une si longue séparation. Je veux leur dire que nous déployons tous nos efforts vis-à-vis de tous les contacts que nous avons pu solliciter et nouer, et que nous ne les oublions pas. Comme nous ne relâchons pas nos efforts pour nos otages détenus au Mali et en Somalie.

En France, la presse écrite a subi le choc de la crise. Elle est aussi confrontée à des problèmes de distribution qui l’affaiblissent financièrement. Mon gouvernement a pris cette question à bras le corps en accompagnant la réforme du système de distribution, sur la base du rapport remis par Bruno METTLING. Il faut que cette réforme de la distribution entre en vigueur pour permettre à la presse de réduire ses coûts, parce que la solidité des entreprises de presse est le meilleur gage de la liberté des journalistes. Les aides de l’Etat, qui vous sont précieuses, ne créeront jamais autant de dynamisme dans la presse que des journaux qui se vendent à des lecteurs nombreux et fidèles, qu’ils préfèrent la version papier ou la version Internet.

Alors permettez-moi, au moment de vous présenter mes vœux, de vous souhaiter d’abord de gagner des lecteurs, des auditeurs, des téléspectateurs, des internautes ! Et ce souhait aura d’autant plus de chance d’être assouvi que nous aurons ensemble mis une distance vis-à-vis de certains réflexes qui dominent notre vie publique. Le réflexe de l'instantané avec la recherche du coup permanent et de l’émotion brute. Je crois que notre société est en quête de valeurs solides, d’explications, d’inscription dans la durée. Le réflexe du scepticisme auquel notre tempérament national nous incline. Je sais bien que les optimistes et les pessimistes sont également nécessaires à la société – les uns inventent l’avion et les autres le parachute – mais ceci étant, les Français gagneraient à être fiers d’eux-mêmes, à être fiers de leur travail, à être fiers de leurs inventeurs, à être fiers de leurs industries. Reste enfin le réflexe de l'outrance. Il y a un paradoxe, plus les idéologies meurtrières et binaires s’effacent, plus notre débat public prend parfois des allures simplificatrices et brutales. Il y a eu tout au long de l'année 2010 quelques indices inquiétants d'une vie politique où le soupçon permanent et l'insulte facile prenaient le dessus sur une forme de retenue, pourtant appréciée des Français. J’ai vu qu’un débat s’était noué autour de l’idée d’indignation ; rien ne serait en effet moins français que l’apathie et l’indifférence. Mais l’indignation pour l’indignation, ça n’est pas un mode de pensée. La complexité du monde actuel réclame d’abord de la lucidité, de l’exigence intellectuelle, parce que tout ne s’écrit pas en noir et blanc, mais elle réclame aussi et surtout des actes.

En cette année pré-électorale, est-ce qu’on peut souhaiter le sens de la nuance au détriment de la violence ? Est-il possible de parier sur la quête d'une vérité équilibrée, qui prétend construire plutôt que détruire ? Peut-on espérer que la difficile tâche d’agir pour la France ne soit pas étouffée par le penchant bien plus facile de tout contester ? C’est en tout cas le vœu que je formule pour notre démocratie.

En cette nouvelle année, je vous adresse chaleureusement et sincèrement des voeux de bonheur et des vœux de santé. Que chacun d’entre-vous puisse éprouver des moments de passion professionnelle, mais aussi toutes ces joies personnelles qui donnent à la vie tout son sens. Et par votre intermédiaire, j’adresse aux Français un message de respect, parce que si notre pays a tenu le choc de la crise, c’est d’abord grâce à eux, et un message de confiance, parce que je veux leur dire que nous avons beaucoup d’atouts pour saisir la croissance. Voilà, je vous souhaite à toutes et à tous une bonne année 2011. Et j’essaierais, Madame la Présidente, de faire en sorte que l’Association de la Presse de Matignon se sente confortée dans son rôle.

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10 janvier 2011 1 10 /01 /janvier /2011 11:45

 

François Fillon prononce le discours de clôture du colloque sur Philippe Séguin, la politique : "une affaire de volonté", à l'Assembmée nationale le 7 janvier 2011.

 

 

Monsieur le Président de l’Assemblée Nationale,

Mesdames et Messieurs et chers amis,

 

Philippe SÉGUIN nous a quittés il y a un an.

Il y a eu le temps de la tristesse et du deuil.

Il y a maintenant le temps de la fidélité et de la réflexion.

D’où vient que sa disparition ait provoqué une émotion si profonde chez nos concitoyens ?

En quoi sa pensée garde-t-elle une actualité et une force d’inspiration pour ceux qui croient en la France ?

Comment nous montrer dignes de son exemple et de ses exigences ?

 

Telles sont quelques-unes des questions que ce colloque a posées, et je ne saurais assez remercier Catherine SÉGUIN, Arnaud TEYSSIER, Vincent ROGER, Jean de BOISHUE, grâce à qui il se tient aujourd’hui.

Mes remerciements se tournent aussi vers Bernard ACCOYER et ses équipes qui ont immédiatement répondu présents pour organiser cette journée.

 

Ma gratitude va enfin vers tous les animateurs et les orateurs de ce colloque qui ont si brillement dirigé et éclairé cette journée. Ils viennent d’horizons divers.

Certains furent des proches de Philipe SÉGUIN, d’autres non, et c’est précisément cette diversité d’analyses que nous souhaitions car c’est elle qui est la plus fidèle à la personnalité de Philippe SÉGUIN, lui qui dans sa singularité et sa liberté ne se reconnaissait ni dans les chapelles, ni dans les clans.

Certains observateurs ont cru déceler dans ce colloque les signes d’une incurable nostalgie française. Ceux qui disent cela négligent les liens entre le passé et l’avenir. Etre moderne, ce n’est pas être sans mémoire !

 

L’héritage de Philippe SÉGUIN est vivant, et ce qui est vivant transcende les clivages et nourrit tous les rivages.

Cet héritage appartient à tous les républicains.

Il ne se prête à aucune captation, à aucune querelle de partage, parce qu’il se définit moins par une étiquette ou un dogme que par l’intégrité d’une trajectoire qui suscite le respect et dans laquelle chacun peut trouver pour lui-même des ressources politiques et morales.

 

Sa personnalité exceptionnelle, chaleureuse et ombrageuse, touchée tour à tour par la mélancolie et par l’espérance, sa profondeur intellectuelle et sa ténacité d’homme d’action formaient un bloc indissociable.

Aucun de ces aspects ne doit occulter les autres.

 

Tout, en lui, était guidé par une notion qui avait à ses yeux valeur de principe : je veux parler de la souveraineté.

Souvenons-nous des termes dans lesquels il la définissait en 1993, dans l’un de ses grands discours, comme la mission historique de la France.

« Cette mission, disait-il, consiste à montrer à tous les peuples que le destin des hommes et des femmes, pris collectivement et individuellement, le destin des communautés comme celui de chaque être, est maîtrisable ; montrer que les êtres, si ils le veulent, sont souverains. Souverains au double sens du mot souveraineté : souverains comme peuple, face au monde tel qu’il va, c’est ce que l’on appelle la souveraineté nationale ; et souverains comme individus face aux pouvoirs, c’est ce que l’on appelle la souveraineté populaire. »

 

C’est l’intuition centrale de Philippe SÉGUIN qui s’exprime ici, avec des accents presque métaphysiques.

 

Elle est indissociable de son idée de la politique comme refus de la fatalité, maîtrise d’un destin, projet collectif qui rend possible et tout à la fois transcende la poursuite légitime du bonheur personnel.

Politique d’abord, République toujours, citoyenneté encore et aussi: c’était là la devise de Philippe SÉGUIN.

Méfions-nous, disait-il, de tous ceux qui veulent gommer ou faire disparaître la politique.

 

Toute sa vie durant, il fut animé par le souci de défendre sa spécificité, sa noblesse, face aux simulacres qui prétendent s’y substituer : l’emprise du spectacle, le partage des prébendes, la technocratie, l’intimidation des logiques économiques.

Il lutta contre les conformismes, les opinions ou les solutions toutes faites qui dépossèdent les citoyens de leur capacité de raisonner, de délibérer et de choisir en conscience les perspectives de leur existence.

Il affirma sans relâche que la politique ne se délègue pas, ne s’exerce pas par procuration, en un mot : ne s’aliène pas.

 

De là découlent tous les traits qui firent la force de son caractère et de son parcours.

Ses admirations de jeunesse, jamais reniées, pour MENDÈS-FRANCE tout d’abord, puis pour le général de GAULLE, qui incarnèrent par excellence cette haute idée qu’il se faisait de la chose publique.

Son destin personnel, qui fut lui-même celui d’un être libre et souverain, né sans fortune et sans privilège, mais que n’impressionna aucune fatalité sociale, qui brisa les déterminismes, et qui accéda aux plus hautes responsabilités par son talent et sa volonté.

La puissance de sa réflexion, de ses argumentaires, de son éloquence, qu’il cultiva sans relâche au nom du respect dû à l’intelligence des citoyens.

Les colères légendaires où le plongeaient le spectacle de la compromission, l’abaissement de la pensée, le renoncement au libre arbitre.

Son goût de l’histoire, sans laquelle un pays s’oublie lui-même, oublie ses valeurs, oublie le fil des conquêtes et des progrès qui le conduisent jusqu’au temps présent et qui font partie des données fondamentales de sa souveraineté.

 

Son attachement à l’idée de la nation, qui demeurait, pour lui, le cadre dans lequel les peuples éprouvent directement leur capacité d’agir sur les choses et d’être maîtres de leur destin.

Son combat contre le traité de Maastricht, qui ne fut pas un combat contre l’Europe, mais un combat contre l’affaiblissement du politique.

« La souveraineté nationale appartient au peuple », rappelait-il, en citant l’article 3 de notre constitution, au commencement de son grand discours de mai 1992, où il demanda que l’adoption de ce traité de Maastricht soit tranchée par référendum, parce qu’aucune assemblée ne peut déléguer un pouvoir qu’elle n’exerce qu’au nom du peuple.

 

De là découlent aussi les grandes lignes de l’action menée par Philippe SÉGUIN dans toutes les charges qu’il exerça.

Il lutta contre toutes les formes d’enlisement et de déclin, pour la modernisation sans laquelle une nation perd la maîtrise de son avenir face au bouleversement des temps.

Député des Vosges, puis maire d’Epinal, il redynamisa le tissu économique d’une région sinistrée par la crise du textile et de la sidérurgie, et il promut la participation des citoyens à la vie politique locale.

 

 

Ministre des Affaires sociales, il misa sur l’emploi en réformant le code du travail et tenta d’infléchir la course des dépenses de santé.

Président de l’Assemblée nationale, il revalorisa notre Parlement, avec la session unique et l’élargissement des droits de l’opposition.

Premier président de la Cour des comptes, il donna une dimension nouvelle à nos juridictions financières, et il ne cessa de nous mettre en garde contre la dérive des comptes publics qui menace, là aussi, notre souveraineté.

J’ajouterai qu’il défendit inlassablement la solidarité des peuples francophones, où il voyait l’un des creusets d’une conscience politique et d’une communauté d’esprit – non plus seulement d’intérêts – à l’échelle internationale.

 

Oui, la politique était pour Philippe SÉGUIN une affaire de volonté, une affaire de courage, comme elle était aussi une affaire de lucidité, d’intelligence et d’honneur.

Il nous a transmis une flamme qui le rattache aux grandes personnalités politiques de notre histoire.

A ceux qui surent affronter la solitude au nom de leur morale.

A ceux qui, au lieu de poursuivre les titres et les prestiges, gagnèrent l’estime de toute la Nation.

 

Cette flamme ne doit pas s’éteindre.

Être fidèle à Philippe SÉGUIN, c’est embrasser l’Histoire en s’instruisant de ses continuités mais aussi de ses ruptures.

C’est continuer de croire au cadre protecteur et émancipateur de la Nation.

C’est nourrir un patriotisme éclairé ouvert sur les desseins du monde : l’Europe, la grande Europe à laquelle la Russie doit être associée, la méditerranée, le Québec, tous ces espaces chers à Philippe SÉGUIN sont autant d’ouvertures vers lesquelles l’universalisme français doit tendre.

 

Etre fidèle, c’est réinvestir en permanence l’idéal républicain en rappelant à chacun qu’il faut donner à son pays autant que l’on reçoit de lui.

C’est être authentique face aux lumières trompeuses du monde médiatique.

C’est agir pour la modernisation de la France, sans ignorer ses héritages mais sans non plus les sacraliser car ce sont les réalités qui dictent les actes et non les songes.

C’est aujourd’hui poursuivre le développement de notre compétitivité et maintenir l’exigence de réduire notre déficit et notre dette publique.

 

C’est dire la vérité aux Français sur les bouleversements qui sont à l’œuvre dans le monde d’aujourd’hui.

Le centre de gravité de l’économie mondiale est en train de basculer vers l’Est et le Sud.

Les pays émergents représentent aujourd’hui la moitié de la production industrielle mondiale. Il y a vingt ans, c’était un tiers.

Bientôt, l’économie chinoise dépassera celle des Etats-Unis. Cette mutation brutale n’est plus un horizon lointain. Elle est devant nous.

 

Alors que tant d’autres négligeaient de regarder hors de nos frontières, Philippe SÉGUIN fut l’un des premiers à nous alerter sur le devenir et les conséquences de la mondialisation.

S’il est une leçon que nous devons retenir de lui, c’est pourtant que la lucidité n’est pas le fatalisme.

Certes, la mondialisation est un fait et c’est se bercer d’illusions que de concevoir notre avenir à l’écart de ce tournant historique.

Mais c’est une autre illusion que de croire que nous devons nous résigner à la subir sans pouvoir agir sur son cours.

 

Philippe SÉGUIN analysait la mondialisation comme un risque à partir du moment où elle signifie la subordination du politique à la sphère économique prise pour référent absolu.

Mais il tenait que ce risque peut être contré, que l’avenir est ouvert et qu’il n’y a pas de déterminisme implacable.

L’effacement du politique n’avait à ses yeux d’autre cause que l’illusion qu’on se fait de son impuissance.

« C’est une façon sournoise de renoncer à la politique que de prendre l’ordre international tel qu’il est », écrivait-il.

 

S’il existe une chance dans la crise qui a frappé l’économie mondiale, c’est d’avoir accéléré la prise de conscience que le retour de la politique est non seulement nécessaire mais fondamentalement possible.

Je crois pouvoir dire que la France y a pris toute sa part.

Au plus fort de la tourmente économique, Nicolas SARKOZY a été, avec à l’époque Gordon BROWN, à l’initiative du G20 des chefs d’Etat et de gouvernement.

C’est l’un des premiers jalons d’une mondialisation politique, où des nations se rassemblent pour agir sur le cours des choses au lieu de le subir.

 

Tel est le sens des priorités que la France défendra cette année à la tête de ce G20 : poursuivre la réforme du système monétaire international ; contrer la volatilité excessive des prix des matières premières ; améliorer la gouvernance mondiale ; favoriser le développement des pays les plus pauvres ; enfin, accorder une attention plus grande à la dimension sociale de la mondialisation – et je veux me souvenir devant vous que cette priorité nouvelle, introduite cette année par la France, était l’ambition même de Philipe SÉGUIN au sein de l’Organisation internationale du travail.

 

Philippe SÉGUIN nous appelait à croire que la France a une action sur le monde, qu’elle peut modifier sa marche, comme d’autres nations, avec d’autres nations.

 

Lui être fidèle, aujourd’hui, c’est continuer à œuvrer pour l’ambition d’une Europe politique.

Tandis que les pays émergents ont commencé à se relancer à grande vitesse, la crise a frappé doublement notre continent: comme crise économique et financière tout d’abord, comme crise de la dette souveraine ensuite.

 

En mettant l’Europe au défi, ces deux phases de la crise ont révélé la justesse du diagnostic qu’avait porté Philippe SÉGUIN dès le début des années quatre-vingt-dix.

Elles ont montré l’impossibilité de confier le destin des peuples à une sorte de pilotage automatique.

Elles ont incité les responsables des nations européennes à reprendre les commandes.

Car l’Histoire n’est pas finie et la réalité nous réserve encore de ces moments où les sociétés humaines ont besoin de débattre et de trancher le nœud gordien, si elles veulent conserver la maîtrise de leur destin.

 

L’Europe, disait Philippe SÉGUIN, n’a de sens que si elle est une entreprise politique, c’est-à-dire «un grand dessein par lequel les peuples s’inscrivent dans l’Histoire».

Si nous l’oublions, les événements nous rappelleront à l’ordre et l’Histoire nous submergera.

 

L’Europe doit être un instrument de souveraineté.

Elle doit répondre aux défis de la conjoncture par la volonté politique.

Cette volonté n’est pas abstraite.

Elle vient des nations qui composent l’Europe et des chefs d’Etat et de gouvernement élus par les citoyens de ces nations.

Philippe SÉGUIN appréciait la manière dont Nicolas SARKOZY, lors de sa présidence de l’Union, avait redonné ses lettres de noblesse à la politique contre une certaine forme d’impuissance.

Face à la crise, la France a joué un rôle déterminant dans la réactivité européenne.

La tourmente et l’urgence ont enclenché des prises de décision inédites sur le continent.

L’avenir nous dira si les évolutions qui sont actuellement en cours répondront au vœu profond de Philippe SÉGUIN de voir émerger une Europe politique.

Ce qui du moins est sûr, c’est que les mentalités ont changé et que la nécessité de franchir de nouvelles étapes est aujourd’hui largement ressentie.

 

L’idée d’une convergence progressive en matière fiscale, voire en matière sociale, au sein de la zone euro ; le besoin de faire de l’Europe un moteur de la croissance et de l’emploi, à travers la recherche, l’innovation, la compétitivité industrielle ; l’affirmation, enfin, de la puissance européenne dans le monde : ces ambitions que nous avons pour l’Europe sont aujourd’hui entendues et déterminent l’agenda des prochains mois et des prochaines années.

 

En France, l’enjeu de souveraineté est aujourd’hui celui de la réduction de la dépense et de la dette publique.

A la tête de la Cour des comptes, Philippe SÉGUIN l’exprimait avec toute son autorité.

La crise de la dette souveraine a montré le caractère éminemment politique de cette tâche.

A force d’emprunter sur les marchés pour financer leurs dépenses, les Etats se sont exposés à subir la dureté de leurs lois.

Leur puissance régalienne n’est plus une caution absolue qui autoriserait des emprunts avantageux et sans limite.

Leur capacité de rembourser est maintenant soupçonnée.

Certes, la France reste l’une des meilleures signatures financières en Europe et les structures de notre économie ne présentent pas les faiblesses spécifiques qui ont plongé certains de nos voisins dans une situation difficile.

Mais nous ne pouvons pas ignorer les avertissements ; nous ne pouvons oublier l’augmentation spectaculaire de notre endettement depuis trente ans ; nous ne pouvons faire comme si nous étions invulnérables en vertu de je ne sais quel privilège, et nous devons faire les efforts nécessaires au maintien de notre réputation, de notre rang, de notre liberté d’agir.

 

Maîtriser nos comptes, ce n’est pas plier devant les spéculateurs et les agences de notation.

C’est chercher à réduire notre dépendance à l’égard des marchés et c’est par conséquent veiller au maintien de notre indépendance.

Nul mieux que Philippe SÉGUIN ne nous aurait rappelé que les missions des Etats ne peuvent se traduire simplement dans les termes de la comptabilité et du rendement.

L’orthodoxie budgétaire n’était pas pour lui une fin en soi.

Mais il refusait le laxisme qui menace notre liberté d’agir et notre mode de vie.

Plus nous sommes en déficit, plus nous empruntons et plus nous devons courir après le remboursement des intérêts de notre dette. Ce cercle vicieux doit être rompu. Le désendettement est la condition d’un Etat fort, respecté, maître de son sort.

La discipline budgétaire est une exigence politique, parce qu’à travers elle c’est la souveraineté de la Nation qui est en cause.

C’est une exigence morale, parce qu’il n’est pas admissible de faire peser sur nos enfants le fardeau de la dette.

 

C’est une exigence sociale, parce que nous ne pouvons accepter l’idée que notre modèle de solidarité soit un jour brutalement compromis par l’asphyxie de nos finances publiques.

 

Nous devons redoubler d’efforts pour préserver notre mode de vie.

Nous devons nous battre avec nos atouts pour créer de l’activité et de l’emploi.

Tout au long de sa carrière politique, Philippe SÉGUIN a vu le fléau du chômage gagner la société française.

Être fidèle à Philippe SÉGUIN, c’est tenir le fil de la cohésion sociale.

C’est chercher à faire converger les intérêts économiques et les intérêts sociaux en réconciliant la productivité et le dialogue social, en imposant aussi une éthique au capitalisme dont certains travers sapent sa légitimité.

Etre fidèle, c’est œuvrer au rassemblement de tous les Français lorsque l’essentiel est en jeu car il n’y a pas un peuple de droite contre un peuple de gauche mais des citoyens dont l’esprit de responsabilité doit être sollicité.

 

Je ne veux pas prétendre que Philippe SÉGUIN aurait donné son approbation unilatérale à tout ce qui aura été fait depuis 2007.

 

Je me souviens de son indépendance et je la respecte trop pour cela.

Mais je veux croire que nous n’aurons pas été étrangers à son esprit, à ce qu’il nous a appris, à l’exemple qu’il nous a donné.

 

Mesdames et Messieurs,

Ce que nous révèle l’émotion qui a touché les Français dans leur ensemble au moment de sa disparition, c’est que nos concitoyens savent faire la différence entre la politique authentique et ses simulacres.

C’est qu’ils sont fiers de leur pays et de leur histoire.

C’est qu’ils savent honorer ceux qui tiennent leur intelligence en estime; ceux qui les appellent à viser au plus haut; ceux qui refusent l’emprise du superficiel.

Tel était Philippe SÉGUIN, qui disait souvent, en citant Démosthène, qu’il faut préférer les paroles qui sauvent aux paroles qui plaisent.

Dieu sait pourtant que nous aimions ses grands discours et qu’à leur manière ils plaisaient aussi.

 

Philippe SÉGUIN nous manque, mais son souvenir est gravé dans nos mémoires.

 

Il demeure présent dans cet hôtel de Lassay qu’il a marqué de son empreinte, comme toutes les institutions où il fut en responsabilité.

 

«Quiconque oublie l’Histoire, l’Histoire l’oubliera », écrivit-il un jour.

Lui n’oubliait pas l’Histoire, et ne sera pas oublié.

Il y a aura toujours, Mesdames et Messieurs, des êtres libres et courageux qui viendront forger leur résolution dans le souvenir de Philippe SÉGUIN.

Il y aura toujours des Français pour entendre sa voix murmurer que la dignité de la politique et l’honneur de la République sont entre les mains de chaque citoyen.

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7 janvier 2011 5 07 /01 /janvier /2011 19:53

 

François Fillon prononce un discours lors du colloque "Nouveau monde, nouveau capitalisme" au Centre Pierre Mendès France le jeudi 6 janvier 2011.

Monsieur le Premier ministre,

Mesdames et Messieurs les Ministres,

Mesdames et Messieurs,

Mon cher Eric,

C’est pour moi un très plaisir et un très grand honneur d’ouvrir ce nouveau rendez-vous, qui a été voulu et organisé par Eric BESSON, pour décrypter les dysfonctionnements de l’économie mondiale mis en lumière, avec quelle brutalité, par la crise financière. Je suis heureux de le faire aux côtés de Monsieur PAPANDREOU, dont je voudrais saluer devant vous le courage et le sens de l’intérêt général.

Cette année, nous tournons nos regards vers la sortie de crise et comment anticiper le nouveau monde qui s’apprête à émerger. Parmi les évolutions marquées de l’année écoulée, il y a le basculement accéléré de l’économie mondiale vers l’Est et vers le Sud/

Les pays émergents représentent désormais plus de 50% de la production industrielle contre 30% il y a vingt ans et détiennent 80% des réserves de change.

La Chine, qui avait ravi à l’Allemagne sa place de premier exportateur mondial, est devenue en 2010 la deuxième puissance économique mondiale. La question est maintenant de savoir quand l’économie chinoise dépassera celle des Etats-Unis ?

En 2003, certains envisageaient que la Chine deviendrait la première économie mondiale à l’horizon 2040 et, à l’époque, cette perspective paraissait bien lointaine et bien aléatoire. Et bien, maintenant, elle est envisageable dès le début de la prochaine décennie. Alors que l’économie américaine n’a pas encore retrouvé son niveau d’avant crise, le PIB de la Chine a augmenté de 28 % depuis 2008 et en 2011.

Même si des signes d’accélération de l’activité se manifestent dans les pays avancés, le rythme de la croissance devrait demeurer à deux vitesses, les pays émergents devant faire face à des risques de surchauffe, alors que les pays avancés doivent encore gérer les cicatrices humaines et financières de la récession.



Bref, cette crise ouvre sur un monde nouveau qui portera l’Asie et l’Amérique Latine sur le devant de la scène. Ce sera un monde hautement connecté, fait d’échanges rapides et d’imagination valorisée, un monde où les civilisations s’entrecroiseront et se frotteront les unes aux autres, un monde où les identités nationales devront être pensées comme des tremplins, pour se projeter vers l’extérieur et vers l’avenir et non pas comme des refuges illusoires.

Ce monde fera la part belle à ceux qui seront être réactifs, mobiles, à ceux qui auront envie de créer, d’innover, il verra émerger de nouvelles activités. Au fond ce nouveau monde, dont je ne sous–estime pas la rudesse et les exigences, a pourtant toutes les chances d’être plus ouvert et plus équitable que l’ancien.

Qui de nous regrettera le temps de la guerre froide et de la bipolarité ? Qui de nous regrettera le temps où des continents entiers se voyaient condamnés au silence et à la pauvreté ?

L’Histoire avance, bouscule les situations acquises, elle ouvre des brèches, l’Histoire nous défie et je refuse de penser que la France et l’Europe soient à ce point frileuses et déclinantes pour ne pas voir que l’avenir reste ouvert. Dans le changement, nous devons voir une opportunité et pas seulement un risque.



L’année dernière, en clôturant ce même rendez-vous Eric, j’avais souligné parmi les effets majeurs de la crise, l’importance du retour du politique et la prise de responsabilité accrue à laquelle elle nous avait invités. Et bien je crois que l’évolution du G20 a donné un exemple fort de cette implication responsable, au dernier sommet à Séoul.

Nous sommes passés à une phase de construction, qui ose les plans sur le long terme et les réformes structurelles.

En l’espace de cinq sommets on peut dire que nous avons sauvé le système financier mondial au bord de l’effondrement. Nous avons efficacement et collectivement lutté contre la tentation protectionniste et nous avons profondément renforcé les institutions financières internationales. Nous les avons dotées de nouveaux moyens. Nous avons fait évoluer leur gouvernance en tirant les conséquences de la place nouvelle que doivent occuper les grands pays émergents dans la gouvernance mondiale : à la Banque mondiale d’abord, entre les Sommets de Pittsburgh et de Toronto, puis au FMI, lors du sommet de Séoul. Enfin, nous avons commencé à réguler le système financier international.

Depuis le sommet de Washington, en 2008, des progrès majeurs ont été accomplis en matière de régulation financière, aussi bien pour les règles en matière de capital et de liquidité des banques que pour l’encadrement des produits dérivés, le contrôle de la titrisation, la lutte contre les paradis fiscaux et l’encadrement du bonus des traders.

Dans l’urgence, je crois qu’on peut dire que les Etats ont su se mobiliser, mais, maintenant que le risque peut paraître s’éloigner, cette dynamique et cette vigilance ne doivent pas faillir. L’avenir et la légitimité du G20 en dépendent, le G20 doit montrer qu’il reste capable de prendre des décisions et de les mettre en œuvre, sans quoi d’autres institutions tenteraient de le remplacer.



Le G20 doit réussir à s’attaquer aux grands chantiers en attente depuis de longues années, je veux vous dire que c’est bien la volonté de la présidence française d’y veiller. Les priorités que nous avons proposées sont connues : la première, c’est la réforme du système monétaire international, auquel vous allez consacrer votre après-midi avec Christine LAGARDE notamment et Felipe LARRAIN.

En matière de régulation financière, nous devons poursuivre les chantiers déjà engagés et nous assurer de la bonne mise en œuvre des règles décidées par le G20 sur toutes les places financières. Nous chercherons aussi à étendre l’agenda de régulation, là où elle reste insuffisante. Il est en particulier impératif de renforcer la régulation du système bancaire parallèle - ce que les anglo-saxons appellent le «shadow banking» - sans cela nous courrons le risque d’aboutir à une situation paradoxale, que nos efforts pour renforcer la régulation du secteur bancaire traditionnel ne fassent finalement que reporter l’activité et les risques vers des nouvelles formes d’intermédiation bancaire qui, elles, auraient échappé à la régulation.

Nous proposerons également à nos partenaires de renforcer le volet «marché» de l’agenda de régulation financière du G20 dans la continuité des travaux européens en faveur d’une meilleure transparence et d’une protection accrue de l’intégrité des marchés. Face à l'excessive volatilité des prix des matières premières (et notamment des prix agricoles et énergétiques) nous aurons aussi à trouver des solutions, et cela sera la deuxième grande priorité de la présidence française.

A ces chantiers s’ajoutera l'amélioration de la gouvernance mondiale, qui concerne aussi bien le G20, son organisation interne et ses liens avec les organisations internationales, que l’ensemble du système des Nations Unies.

Notre monde globalisé a besoin d'un système multilatéral qui fonctionne de manière plus efficace.

Nous avons réussi à réformer la Banque Mondiale, nous avons réussi à donner un nouvel élan et de nouvelles responsabilités au Fonds Monétaire International, est-ce qu’on peut en faire de même avec les Nations Unies ? Sans vouloir se substituer aux organes compétents des Nations Unies, la France entend poser cette question légitime.



Enfin, la présidence française du G8 et du G20 sera l’occasion d’offrir un tremplin à des sujets dont nous considérons qu’ils ont été insuffisamment ou pas du tout traités jusqu’ici.

A Séoul, on a évoqué pour la première fois le développement, qui jusqu'ici ne relevait pas du G20, et je pense qu’on ne peut pas envisager de croissance durable sans y engager le continent africain et les pays les plus pauvres.

C’est la raison pour laquelle nous avons mis en avant le financement des infrastructures et la sécurité alimentaire, auquels la France a souhaité ajouter les financements innovants, indispensables pour compléter l'aide publique au développement.

A Séoul également, le Président de la République a souhaité mettre à l’ordre du jour la dimension sociale de la mondialisation. Le constat, tout le monde peut le faire, dans un contexte d'une mondialisation déséquilibrée le social est une variable d'ajustement et fait l’objet le plus souvent l’objet d’une forme de dumping. Ces dumpings ont des coûts humains mais aussi des coûts sociaux, environnementaux, qui sont considérables.

La mondialisation ne doit pas servir à excuser des renoncements éthiques et politiques, une meilleure régulation sociale de la mondialisation est possible et elle est nécessaire - nous en avons la conviction - c’est pourquoi nous allons la mettre au cœur de la présidence française du G20. L’Organisation Internationale du Travaila toujours défendu cette thèse, avec courage, et, pour aider ce chantier à progresser, nous pensons qu’elle aura un rôle primordial à jouer.

Dans le cadre du G8, la question de l'Internet et plus généralement de l’économie numérique a été identifiée comme un sujet de réflexion central. D’abord, parce que de secteur représente une part de plus en plus importante de notre économie. En 2030 Internet devrait représenter 20% du Produit Intérieur Brut mondial, mais aussi parce qu’il irrigue tous les secteurs et qu’il est facteur de compétitivité, qu’il crée de l’emploi, qu’il concourt à l’attractivité des territoires, enfin parce qu’il offre à tous un accès irremplaçable à la culture et à l’éducation, et pourtant – il faut bien le dire – jusqu’à maintenant très peu de rencontres de haut niveau, je veux dire de rencontres au niveau des chefs d’Etat et de Gouvernement de la planète, lui ont été consacrées.

Nous souhaitons évoquer plusieurs aspects. L’accès et au financement des infrastructures, un sujet auquel nos différents pays sont confrontés et sur lequel pourront partager leur expérience, la question de la valeur et de son partage entre les différents acteurs ainsi que celle des différents modèles économiques.

On ne peut pas continuer à imaginer une organisation d’économie numérique où les activités qui se tiennent sur le territoire des Etats ne donnent pas lieu à une participation, au financement des infrastructures et de la vie sociale de ces Etats. Cette question englobe aussi le respect de la propriété intellectuelle, celle de la rémunération des contenus, ainsi que le traitement fiscal des services numériques.

Autre grand volet, nous devrons réfléchir aux meilleures manières de renforcer la sécurité et la confiance dans les réseaux et dans les services numériques. Cela implique de se pencher sur la protection des données personnelles et des libertés individuelles, sur le droit des consommateurs, sur la sécurisation des paiements, mais aussi sur la résilience des réseaux et la lutte contre la cybercriminalité.



Mesdames et Messieurs,

Le premier cadre d’action de la France à l’international c’est bien sûr la Zone Euro. Or ces derniers mois la Zone Euro a fait l’objet d’attaques sérieuses. La tourmente qui a affecté le système bancaire irlandais, associée aux problèmes budgétaires du pays, a entraîné une reprise de l’instabilité sur les marchés souverains de certains pays de la Zone Euro.

Des spéculateurs ou des commentateurs qui, le plus souvent, n’ont jamais cru à la monnaie unique font le pari d’une contagion à d’autres pays. Eh bien je veux d’abord rappeler que cette crise n’est pas la crise de l’euro, l’euro est indiscutablement une monnaie forte, c’est la seconde devise mondiale, elle est devenue l’une des principales monnaies de réserve.

Cette crise, c’est surtout une crise de confiance à l’égard de certains pays de la Zone Euro qui ont été affaiblis par la crise économique et dont les modèles de croissance ont vu leurs lacunes exposées par la crise : la dérive des finances publiques pour la Grèce – Monsieur PAPANDREOU vient de l’évoquer - ou la bulle de l’endettement liée à l’immobilier en Irlande.

Au départ, il y a d’abord une crise budgétaire classique - comme on en trouve dans l’Histoire économique en sortie de crise financière - les conséquences ce sont l’effondrement des recettes fiscales, la hausse des dépenses publiques et, donc, l’explosion de l’endettement public.

Pour un certain nombre de pays, ces déséquilibres budgétaires sont aggravés par la nécessité de résorber simultanément un excès d’endettement privé et une bulle immobilière. Leurs difficultés viennent, enfin, d’une perte de compétitivité due à une augmentation excessive des coûts salariaux et d’un creusement sans contrôle des comptes extérieurs.

Ces dérapages ne sont pas le fruit de la monnaie unique, ils sont le fruit de politiques économiques inadéquates, ils sont la conséquence de déficits publics insuffisamment réduits durant les périodes d’expansion, d’une régulation bancaire insatisfaisante qui ne tient pas compte de la montée des risques et d’une maîtrise insuffisante de l’évolution de la demande intérieure.

Bien sûr ces dérapages nous interpellent collectivement, parce que notre responsabilité, c’est de mettre en place les mécanismes de surveillance au niveau européen qui permettront de prévenir ces risques.

Mais je voudrais souligner deux choses, que l’on perd trop souvent de vue.

Le dérapage des finances publiques, le gonflement de bulles immobilières et de crédit, l’érosion de la compétitivité n’ont pas concerné que les pays de la Zone Euro. D’autres pays ailleurs ont connu ces phénomènes et parfois même de grande ampleur.

Pour les pays de la zone dont les politiques se sont révélées inadéquates, les ajustements sont devenus inévitables. Mais nous ne devons pas laisser croire qu’il en serait allé autrement si ces pays n’avaient pas appartenu à la Zone Euro, aucun pays confronté à une crise sérieuse de sa dette souveraine n’a échappé à une compression du pouvoir d’achat et de la demande intérieure.



La crise, qui touche certains pays de la Zone Euro, ne remet pas en cause la pertinence de cet espace commun, ni les bienfaits apportés par plus de dix ans de stabilité des changes.

L’Euro a favorisé le développement d’un grand marché au bénéfice des consommateurs et des entreprises, l’Euro a rempli son objectif de stabilité des prix et de préservation du pouvoir d’achat des ménages, personne n’ose imaginer les désordres monétaires que nous aurions connus en Europe si la monnaie unique n’avait pas existé lors de la crise de 2008 et, contrairement à ce qu’on entend parfois, l’Euro n’a pas constitué un frein à la croissance. De 1999 à 2009 le PIB par habitant a progressé de 2,7% en France.

Globalement, la Zone Euro reste solide et, lorsqu’on examine la situation des finances publiques de la Zone Euro dans son ensemble - comme vient de le dire à l’instant le Premier ministre Grec - elle est moins dégradée que celle des Etats-Unis ou du Japon.

C’est visible en termes de déficit : - 6,7% du PIB pour la zone Euro en 2010 contre respectivement -11,1 et - 9,6 pour les Etats-Unis et le Japon. En termes de dette également avec 84% du PIB pour la Zone Euro fin 2009 contre respectivement 93 et 226% pour les Etats-Unis et le Japon.



Mais nous ne devons pas non plus, au regard de ces comparaisons, nous voiler la face. La crise a révélé des insuffisances d’organisation au sein de la Zone Euro, la surveillance des Etats de la Zone Euro a montré d’évidentes lacunes, entraînant une dangereuse divergence de compétitivité entre les Etats membres et on a vu que la Zone Euro ne disposait d’aucun mécanisme de stabilisation financière.

Face à ces lacunes, la réactivité de la Zone Euro a été extrêmement forte, je sais qu’il y a eu des critiques ici ou là sur la façon dont l’Europe a réagi à la crise, mais je voudrais dire que ceux qui les portent ne mesurent pas l’ampleur des décisions qui ont été prises en moins d’un an.

Face à la crise de la dette souveraine grecque l’Union Européenne a adopté un programme massif d’assistance de 110 milliards d’euros, conditionné par un programme d’ajustement budgétaire que la Grèce continue à mettre en œuvre de façon résolue et, je veux le dire, en saluant à nouveau le Premier ministre Grec, très courageuse.

Ensuite, la Zone Euro a mis en place le Fonds Européen de Stabilisation Financière d’un montant potentiel de 440 milliards d’euros, auxquels il faut ajouter 60 milliards de fonds de l’Union Européenne et 250 milliards apportés par le FMI. Ce mécanisme provisoire, valable pour trois ans, vient d’être utilisé pour l’Irlande, accompagné de mesures budgétaires strictes du Gouvernement irlandais.

Enfin, la BCE a joué son rôle en assurant la liquidité sur les marchés et en maintenant son programme de rachat des obligations souveraines qui assure un bon fonctionnement de la politique monétaire et qui rassure les marchés. En contrepartie la BCE exige, et c’est bien normal, des engagements forts des Etats, tant au niveau national sur la réduction des déficits, qu’au niveau européen.

La gestion de crise a été indiscutablement réussie, mais en même temps il faut reconnaître qu’elle ne suffit pas. Des mesures structurelles étaient indispensables et, là encore, la Zone Euro a fait preuve de réactivité.



Face à la crise de confiance qui frappe certains pays de la Zone Euro, le Conseil européen a adopté un ensemble de règles qui renforcent la surveillance des comptes publics, celle de la dette publique et l’évolution des déséquilibres macroéconomiques susceptibles de peser sur la Zone Euro.

Ces règles constituent un pas en avant majeur dans l’intégration des pays de la Zone Euro puisque, au-delà des questions budgétaires, c’est la question des déséquilibres économiques internes à la zone qui fera l’objet d’une surveillance étroite et ces règles vont bientôt être traduites en textes législatifs.

Parallèlement, nous nous sommes dotés d’instruments de gestion de crise permanents. La Zone Euro va créer un mécanisme permanent de stabilisation financière qui prendra en juin 2013 le relais du Fonds créé pour trois ans. Le nouveau mécanisme, formellement autorisé par le traité, reposera donc sur des bases juridiques solides, rendues possible par la révision du traité de Lisbonne lancée en décembre 2010.

Au plan institutionnel, la réactivité et la capacité d’adaptation de l’Union Européenne et de la Zone Euro ont donc été incontestables.

Au plan économique, on voit apparaître les signes encourageants d’une résorption des déséquilibres : l’Irlande a regagné depuis deux ans une part importante de sa compétitivité perdue ; en Espagne, les déficits budgétaires et la balance des paiements courants se résorbent ; et l’ensemble des pays européens devrait bénéficier du regain de dynamisme de la demande intérieure en Allemagne.



Pour autant peut-on penser que tout ce qui est nécessaire a été fait ? Je ne le crois pas !

D’abord un chemin important reste à parcourir pour que les ajustements économiques effacent les déséquilibres qui se sont créés au sein de la zone. Ensuite, l’Europe donne encore parfois l’impression d’être en retard sur les marchés, de réagir avec efficacité aux menaces immédiates, mais sans avoir de plan de long terme.

Devant ce constat, je propose trois axes principaux :

Le premier, c’est le renforcement de la cohésion de la Zone Euro. Une zone monétaire solide nécessite une surveillance attentive en matière budgétaire mais aussi – et c’est bien ce qui a manqué depuis l’origine - une convergence minimale en matière fiscale, voire en matière sociale. Ce sera la grande question des prochains mois et des prochaines années.

Après cette crise, les questions de convergence et d’harmonisation vont s’imposer en haut des priorités européennes, y compris dans des domaines longtemps ignorés pour cause de sensibilité politique

Et c’est dans cet esprit d’ailleurs que j’accueille de façon positive l’ouverture d’un débat en France sur le coût du travail et sur la question des 35 heures. Je l’ai dit à plusieurs reprises, depuis plusieurs années, on ne peut pas imaginer à long terme une Zone Euro dans laquelle les temps de travail, l’âge de la retraite, le coût du travail soient complètement divergents.

Nous devons aussi aller plus loin dans le soutien européen à la croissance et à l’emploi, la sortie de crise ne se fera, c’est une évidence, que par le retour de la croissance. C’est aussi la clé de l’adhésion de nos concitoyens à l’idée européenne.

Les bons résultats récemment enregistrés par certains pays européens montrent que l’on peut continuer à parier sur l’industrie, sur la technologie, sur l’excellence.

L’Europe doit donc favoriser la recherche, l’innovation, la compétitivité industrielle.

Puisqu’au fond le sujet de ces rencontres c’est le nouveau monde et le nouveau capitalisme, je veux dire que, plus que jamais, il faut que nous acceptions que le marché ne peut pas tout faire et que ce n’est pas le marché qui, aux Etats-Unis, a été toujours le moteur de l’innovation technologique. Ce n’est pas le marché qui est en Chine le moteur de la croissance et des progrès technologiques que font aujourd’hui les industries chinoises. Et nous-mêmes nous avons dans notre histoire, en Europe, des exemples qui sont des exemples à succès qui montrent que, lorsque c’est nécessaire les Etats doivent s’engager pour accompagner, pour initier, pour impulser les efforts en matière de recherche d’innovation, de compétitivité, et dans cet esprit je pense qu’il faut réorienter les programmes européens de recherche pour maximiser leurs effets sur l’industrie. C’est dans ce but que la France propose de lancer un Fonds Européen des Brevets et un Fonds Européen de Capital Risque.



Il faut aussi que l’on mesure avec soin l’impact des projets de nouvelle réglementation européenne sur la compétitivité de nos entreprises et il faut que l’impératif de croissance et d’emploi soit intégré dans la politique commerciale et la politique de concurrence de l’Europe. Enfin, il faut aller plus loin dans l’affirmation de la puissance européenne dans le monde, avec une monnaie solide, avec une Banque Centrale Européenne crédible, avec des institutions rénovées, un Président permanent du Conseil européen, un nouveau service européen d’actions extérieures en voie de constitution, l’Europe (première puissance économique mondiale) a désormais tous les moyens de faire entendre sa voix face à l’Amérique et aux grands pays émergents.



La France entend que l’Europe soit au centre de la nouvelle gouvernance mondiale, qu’il s’agisse de l’avènement d’un nouvel ordre monétaire mondial, de la poursuite de la régulation financière internationale ou des efforts communs en matière de stabilisation des matières premières alimentaires.

Mesdames et Messieurs,

Il y a dans l’Histoire humaine des moments de rupture et j’ai la conviction que nous vivons l’un de ces instants où tout peut basculer dans un sens ou dans un autre, certains peuvent être pris de vertige devant l’étendue des changements qui s’annoncent, certains peuvent être tentés de les minorer pour ne pas avoir à se remettre en question, d’autres peuvent être tentés de les dramatiser pour faire valoir leurs discours populistes.

Moi je vous propose de prendre le contre-pied de ces attitudes. Nous devons être lucides, nous devons être visionnaires, nous devons être généreux et ambitieux, parce que l’avenir de la condition humaine ne s’écrit pas à l’encre du passé et des tourments.

Le choix de la raison, le choix de l’audace, le choix de la responsabilité doit guider vos réflexions et doit guider les pas des hommes d’Etat.

 

 

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7 janvier 2011 5 07 /01 /janvier /2011 17:02

 

François Fillon prononce un discours à l'issue de l'audience solennelle de rentrée de la cour des comptes et inaugure la Galerie Philippe Seguin le jeudi 6 janvier 2011.

 

 

Monsieur le Président de la République, Cher Jacques Chirac,

Messieurs les Présidents du Sénat et de l’Assemblée nationale,

Mesdames et messieurs les Ministres,

Monsieur le Premier Président,

Monsieur le Procureur général,

Mesdames et Messieurs,

 

Cette rentrée solennelle s’engage sous le sceau du souvenir.

La disparition soudaine de Philippe Séguin il y a un an, a provoqué une émotion profonde dans notre pays et après le temps du deuil il nous revient de faire partager son héritage intellectuel et politique. Cet héritage appartient à tous les Républicains, à tous les Français, à tous ceux qui ressentent les devoirs qui s’attachent à une citoyenneté engagée et éclairée.

Je sais quelle fut la tristesse que vous avez ressentie à la Cour des Comptes. Parce qu’il avait ici des amis et que vous saviez quelle était sa force de travail, sa hauteur de vues, son exigence morale. Parce qu’il était devenu pour nos concitoyens la voix et le visage de votre institution. Parce qu’il existait entre lui et la Cour un lien ancien. Il l’avait rejointe en 1971, à sa sortie de l’ENA. Et je crois qu’on peut dire que ce choix n’avait été ni de circonstance ni de confort, mais de conviction. Il était fier d’appartenir à la Cour. Il en appréciait l’esprit fait de liberté, de rigueur, de précision. Il en partageait la vocation fondamentalement républicaine qui est de veiller à l’usage régulier, juste, efficace, de l’argent public.

Au centre de la pensée et de l’action de Philippe Séguin, il y avait une idée directrice qui était celle de la souveraineté, c’est-à-dire de la capacité qui revient à un peuple de maîtriser son destin et de le déterminer en conscience. Au fond, il y avait pour lui une sorte d’essence de la politique qui réside dans cette liberté de raisonner et de choisir, cette liberté qu’il faut préserver contre la société du spectacle, contre une certaine technocratie, contre le conformisme et la facilité.

Philippe Séguin savait que cette souveraineté s’incarne dans l’Etat et il savait que cet Etat peut être affaibli par l’accroissement du déficit public et de l’endettement. Erigée en dogme, l’orthodoxie budgétaire n’avait à ses yeux aucun sens, mais le laxisme était pour lui une complaisance coupable, et pour tout dire, une menace pour la Nation. Un pays fort, un pays respecté, un pays en mesure de déterminer ses options politiques et de préserver son mode de vie, c’est un pays qui maîtrise ses comptes. C’est un pays qui ne vit pas artificiellement au dessus de ses moyens. C’est un pays qui ne reporte pas sur ses enfants toute la responsabilité de sa gestion.

La crise de la dette qui frappe certains de nos voisins montre à quel point la réduction des dépenses est un enjeu éminemment politique, un enjeu national qui dépasse les querelles de partis. La puissance régalienne des Etats n’est plus une caution absolue qui autoriserait des emprunts avantageux et sans limite. Nous ne pouvons pas ignorer les avertissements. Nous ne pouvons pas occulter la vérité, qui est que nous dépensons trop, pas toujours à bon escient et cela depuis trop longtemps.

Être attentif à nos finances publiques, cela n’est pas se soumettre aux diktats des spéculateurs ou des agences de notation. Nul moins que Philippe Séguin ne l’aurait accepté. Etre responsable et rigoureux, c’est au contraire limiter notre dépendance à l’égard des marchés. Evaluer, réorienter, réinventer en permanence le fonctionnement de l’Etat et de nos politiques publiques, c’est redresser et revitaliser constamment la République ; c’est refuser de la voir s’assoupir dans le confort des habitudes, de la routine, des privilèges, tous ces maux qui sont l’antichambre du déclin.

Bien sûr, les Etats ont des missions particulières qui ne répondent pas à des logiques de court terme. Bien sûr, la France a des bases solides et reste l’une des meilleures signatures financières en Europe. Mais notre réputation ne nous dispense pas de faire des efforts nécessaires à la préservation de notre rang, de notre liberté d’agir, de notre capacité à investir et à maintenir notre modèle social. Ceux qui opposent la force de l’Etat à la rigueur de l’action publique, ceux qui opposent la discipline budgétaire à la justice sociale, ceux qui défendent les positions acquises en oubliant les exigences du progrès collectif, oublient que la facture des déficits arrive toujours un jour. Et cette facture mine la République. Dans cet impératif de maîtrise des finances publiques, le rôle de la Cour des Comptes est central.



Le premier discours du député Philippe Séguin à l’Assemblée nationale en juin 1978, fut pour défendre les moyens en personnel de la Cour. Et lorsqu’il fut Président de l’Assemblée nationale, il affirma la force des liens entre la Cour et le Parlement, au moment où Pierre Joxe était le Premier président de votre institution. En assumant cette fonction à son tour, Philippe Séguin a offert en partage aux juridictions financières toute l’autorité qui lui venait des Hautes responsabilités politiques qu’il avait exercées. La célébration du bicentenaire de votre institution en 2007, a coïncidé avec le lancement de la réforme de l’Etat voulue par le Président de la République.

En 2004, l’année même où il était nommé à la tête de la Cour, Philippe Séguin écrivait : « Cela fait trente ans qu’on parle de réforme de l’Etat, sans que celle-ci, pourtant indispensable, soit conçue ni a fortiori mise en œuvre. Or, cette réforme, c’est par la Cour qu’elle pourrait et devrait s’opérer si l’on veut qu’elle ait enfin lieu. »

Par sa personnalité, Philippe Séguin était de ceux qui pouvaient défendre la tradition de la Cour des comptes, et lui donner en même temps les moyens de négocier un tournant impliquant de renouveler et d’élargir ses missions, pour qu’elle devienne selon les termes employés par le Président de la République au moment du bicentenaire : « le grand organisme d’audit public dont la France a besoin ». Philippe Séguin a fait entendre la voix de la Cour. Il voulait que ses rapports ne viennent pas s’entasser dans les armoires de la République, mais servent à l’information des citoyens et à l’adoption des mesures nécessaires.



Je veux prendre quelques exemples qui illustrent la triple exigence d’efficacité, de clarté et de justice au nom de quoi, sous sa Présidence, votre institution a contribué à la révision de nos politiques publiques. La Cour avait particulièrement pointé, dans son rapport de 2007 sur l’application de la loi de financement sur la Sécurité sociale, la situation anormalement favorable des stock-options au regard des prélèvements sociaux. C’était non seulement un manque à gagner mais aussi une exception discutable sur le plan de l’équité. Et bien, sur la base de vos propositions nous avons encadré, moralisé et mis à contribution les revenus additionnels.

La Cour traque les dépenses inutiles, repère les dispositifs incohérents, aide le gouvernement à mettre de l’ordre dans le maquis de nos aides publiques. Ce fut le cas avec la réforme des contrats aidés et en particulier la création du contrat unique d’insertion qui s’est largement inspirée des propositions que vous aviez énoncées en 2006. Je pense aussi à la réforme du «1% logement» qui a tiré les conclusions de votre rapport public annuel de 2009. Mais la Cour des Comptes n’est pas seulement un censeur sourcilleux du mauvais usage des deniers publics. Elle doit aussi faire la lumière sur les absurdités et les injustices et Philippe Séguin y tenait beaucoup.

Pour ne prendre qu’un seul exemple, je me souviens qu’il s’était personnellement engagé sur la décristallisation des pensions des anciens combattants africains. Le Président de la République s’en est saisi en annonçant le 14 juillet 2010, l’alignement des pensions de tous ceux qui se sont un jour battus pour la France. Ce principe est aujourd’hui inscrit dans notre Loi de Finances pour 2011. Il faut en la matière, saluer la contribution de la Cour des Comptes. Il faut saluer la ténacité et le sens de la justice de Philippe Séguin, pupille de la Nation, fils de l’aspirant Robert Séguin, du 4ème régiment de tirailleurs tunisiens, mort au front à 22 ans.



Avec Philippe Séguin, la Cour a renforcé le poids de sa parole dans le débat public. Le Président de la République et le Gouvernement sont à son écoute. Nous serons très attentifs cette année, au rapport que votre Premier président fera conjointement avec nos partenaires allemands sur l’évolution comparée de nos fiscalités. Si je parle de débat public, c’est bien sûr parce qu’il y a aussi des échanges contradictoires qui font la vie de la démocratie. Le fait que le gouvernement fasse lui-même entendre son point de vue devant les diagnostics portés par la Cour témoigne en rien de je ne sais quelle opposition stérile : c’est au contraire la marque de l’autorité de votre institution. J’ai eu l’occasion d’exprimer mes réserves après les remarques de la Cour sur notre plan de relance, en défendant l’impératif de réactivité auquel nous étions confrontés pour sauver notre économie dans la crise mondiale, en défendant aussi les efforts engagés pour assurer l’efficience de ce plan.

Avec Philippe Séguin, la Cour a renforcé ses liens avec le Parlement, qui signe son rôle éminent au sein de notre République. J’ai dit qu’il avait œuvré à ce rapprochement lorsqu’il présidait l’Assemblée nationale. A partir de 2001, la loi organique relative aux Lois de Finances a encore accru cette évolution. Le consensus qui a entouré sa mise en place montre que l’exigence de rationalité et d’efficacité qui doit prévaloir dans la gestion de nos finances publiques transcende les clivages partisans.

Et le fait que les deux pères fondateurs de cette loi organique – Didier MIGAUD et Alain LAMBERT – soient désormais réunis ici dans votre institution, symbolise le rôle républicain de la Cour des Comptes, qui est au service de l’intérêt général et de la France tout entière. En 2008, la révision constitutionnelle a consacré l’importance de la mission d’assistance de la Cour auprès du Parlement. L’hommage que les Présidents des deux Assemblées lui font de leur présence témoigne aujourd’hui de ce travail commun.



Mesdames et Messieurs,

La dynamique impulsée par Philippe Séguin se mesure dans les différents secteurs de l’activité des juridictions financières. Les Chambres des Comptes régionales et territoriales ont accru la part qu’elles prennent à l’évaluation des grandes politiques publiques, parce que ces politiques sont de plus en plus exercées en commun par l’Etat et les collectivités territoriales. C’est notamment le cas pour la dépendance des personnes âgées. Par deux fois, en 2005 et en 2009, les juridictions financières ont su poser un diagnostic clair des enjeux du vieillissement : risque financier majeur si rien n’est fait, menace de déséquilibre des politiques sociales départementales, inadéquation partielle de l’offre de services, poids du reste à charge pour les résidents d’établissements et leurs familles.

Et bien ces questions sont aujourd’hui au cœur du grand débat national sur la dépendance que nous venons d’engager. Les juridictions financières ont adapté et renouvelé leurs méthodes de travail et leurs compétences. Elles ont mené à bien la réforme de nombreuses procédures – dont celle des procédures juridictionnelles, issue de la jurisprudence de la Cour européenne des Droits de l’Homme. Elles assument désormais la mission complexe – mais nécessaire pour la sincérité de la gestion publique – de la certification des comptes de l’Etat et de la Sécurité sociale. Elles se sont dotées de nouveaux outils, virtuels pour certains, liés à la dématérialisation des pièces comptables, très tangibles pour d’autres, comme dans ce Palais Cambon qui a été profondément refaçonné.

Parmi ses évolutions, la Cour a conforté son rang au sein de grandes institutions d’audit international. Ce pan de votre activité vous associe directement au rayonnement de la France. Philippe Séguin était très attaché au développement des missions de Commissariat aux Comptes assurées par la Cour auprès de grandes organisations internationales comme l’UNESCO, l’OCDE ou le Conseil de l’Europe.

Le Président Abdou Diouf se souvient certainement de l’importance personnelle qu’il accordait à l’audit externe de l’Organisation internationale de la francophonie, lui qui était tellement soucieux de promouvoir la solidarité des peuples qui partagent notre langue. Philippe Séguin avait dit, en vous présentant ses vœux en 2008, que les changements dont il avait la pleine paternité se résumaient à l’installation de sous-verres dans les couloirs et à la climatisation de la Grand’Chambre.

Il faut naturellement faire la part de la modestie et de l’humour dans ces propos, mais aussi de l’hommage légitime qu’il tenait à rendre à ses prédécesseurs. Vous mesurez comme moi l’importance du rôle qu’a joué Philippe Séguin à la tête de votre institution. Je sais que Didier Migaud a à cœur de suivre le cap qui a été tracé. L’action qu’il a conduite depuis sa nomination atteste de ses ambitions pour la Cour. En 2011, votre institution produira un bilan très attendu des 10 ans de la LOLF.

Permettez-moi d’ailleurs, sans préjuger de vos travaux d’en dire un mot issu de ma propre expérience. J’ai pu mesurer à quel point la LOLF avait amélioré la lisibilité du cadre budgétaire et mis un terme à certaines pratiques de gestion du passé. Elle a aussi eu l’immense mérite d’associer budget et performance, ce qui représente une innovation des plus importantes, sans laquelle il n’aurait pas été possible de passer à l’évaluation systématique de politiques publiques qui a été le fil conducteur de la Révision générale des politiques publiques et des budgets triennaux depuis le début du quinquennat.

Mais ce que j’ai pu mesurer aussi, c’est que ce cadre n’était pas à lui seul suffisant pour garantir une bonne gestion. Il faut non seulement de bons outils, de bonnes structures, mais il faut aussi définir un cap clair face aux aléas de la conjoncture et il faut encore et surtout de la volonté politique pour tenir ce cap. La France a besoin pour cela, de juridictions financières qui poursuivent leur effort de modernisation, tout en étant assurées des moyens qui leur sont dus et confortées dans l’éminence de leur fonction. Tel était le sens de la réforme voulue par Philippe Séguin, dont le projet de loi a été approuvé par le Conseil des ministres en octobre 2009. A la suite du souhait d’évolution de ce texte que vous avez exprimé et que Didier Migaud a relayé et de son examen par la Commission de l’Assemblée nationale, les discussions doivent se poursuivre. Mais sachez que ma résolution à engager cette réforme est totale.

L’article 15 de la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen, inscrit dans cette Grand’Chambre, exprime, Mesdames et Messieurs, le caractère fondamental de votre mission en affirmant que : « la société a le droit de demander compte à tout agent public, de son administration ». Vous savez comme moi avec quelle profondeur Philippe Séguin méditait les enseignements de l’Histoire. S’il voulait que la Cour change, c’était pour qu’elle demeure face à l’évolution des temps, cette « institution essentielle et irremplaçable » à laquelle Jacques Chirac avait rendu hommage en janvier 2007.

Les Français ne peuvent accepter les efforts nécessaires que nous leur demandons que s’ils ont par ailleurs l’assurance que les deniers publics ne sont pas utilisés en vain. Votre mission est noble puisqu’elle contribue à cette confiance sans laquelle l’acte républicain lui-même se trouve fragilisé. Tel est le sens de votre serment de magistrats, dont l’humilité fait aussi la grandeur. Puisse-t-il retentir en vous avec une intensité particulière lorsque vous entrerez dans la galerie Philippe Séguin qui jouxte cette Grand’Chambre et que j’ai aujourd’hui l’honneur d’inaugurer en sa mémoire.

 

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